« Générations désenchantées » par Rodolphe Bocquet

05/10/2023

Peut-on croire encore au progrès alors même que pèse sur nous la menace d’une catastrophe totale? Comment se représenter un monde meilleur alors même que les limites planétaires se voient peu à peu toutes dépassées au point de menacer la survie de l’espèce? Est-il encore temps de faire le chemin inverse, à savoir de décroître pour progresser? Ex-trader à la Société Générale, Rodolphe Bocquet en livre une analyse profonde et saisissante pour QG

Mes amis me regardent souvent avec une circonspection amusée. Au cours de mes neuf CDI, j’ai fait mienne cette citation de Faust : « L’homme erre tant qu’il cherche[1]». Cette aspiration à un mieux-être est le moteur de mon progrès. Je prétends qu’elle me permet d’accéder à une plus riche compréhension du monde. Elle me fait aussi douter, me met régulièrement en risque et génère son lot de désillusions. Lorsque la pandémie a donné lieu à un mouvement massif de démissions[2], je me suis senti moins seul. Mais cette mise au pluriel de « génération désenchantée[3]» inquiète autant qu’elle réconforte ; la crise semble perdurer, voire s’aggraver. Alors, quand j’ai vu ce livre intitulé « Peut-on croire encore au progrès ? »[4], j’ai eu envie de savoir ce que sept intellectuels[5], réunis dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne en Novembre 2022, avaient à partager.

Grand amphithéâtre de La Sorbonne à Paris

Au sortir de ce banquet, la faim demeure et l’ulcère sourd. Les convives discourent mais aucun dialogue, encore moins de débat. La pitance est maigre et lorsque qu’un peu d’épices titille nos papilles, c’est la portion congrue[6]. Jean Viard s’emploie comme il peut mais l’improbable alchimie du soufflé au progrès ne prend plus. Quels que soient les arguments de rationalité, d’autorité, dont certains passablement faisandés.

En quelques mots, voici au sein des propos des intervenants, et des choix éditoriaux, ce qui ne passe pas : l’oubli de ceux qui questionnent le progrès comme moteur du progrès lui-même ; l’invention d’une peu aimable confrérie d’anti-progrès, passéistes, apeurés et dépourvus d’imaginaire ; une caricature éculée de la décroissance ; la radicalité présentée comme repoussoir dans une forme d’indécente légèreté face à ce qui est en jeu ; et in fine, l’absence de véritable proposition structurante pour sortir de ce que tout le monde, intervenants et nous, lecteur, s’accorde à qualifier de crise du progrès.

Mais ce livre, avec ses limites (format court, représentation probablement partielle des échanges du colloque et encore plus de la pensée des auteurs) a le mérite d’exister. Il m’a permis de creuser ce qu’il contenait pour moi d’irritant. Ce sont ces points saillants que j’ai choisi de détailler ici, emprunts de toute leur subjectivité. Il m’a donné envie de mettre en forme ma pensée, de faire certaines recherches, de lire d’autres livres. Bref, de progresser.

Couverture de l’ouvrage, aux éditions de l’Aube

Qu’est-ce que le progrès ?

Le progrès est par essence aigre-doux. Consolateur[7] et sacrificiel comme le dit Etienne Klein. « Croire au progrès, c’était accepter de sacrifier du présent personnel pour fabriquer du futur collectif ». Le progrès a un coût.

Ce coût revêt différents visages. Individuel pour le bénéfice collectif : les économies réalisées par des parents pour l’éducation de leurs enfants ou les investissements consentis pour la recherche médicale. Inversement, le progrès individuel peut se réaliser au prix d’une régression collective, comme c’est le cas de modes de vie ultra-carbonés mettant en péril l’humanité. Autres coûts, les habitudes que le progrès bouscule ou les inégalités qu’il génère lorsqu’il advient, privilégiant temporairement le groupe restreint qui en bénéficie initialement.

L’innovation n’est qu’un ingrédient du progrès. La condition de possibilité de celui-ci est que celle-là s’inscrive dans un prérequis spirituel, moral et politique. « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme » écrivait Rabelais, ce qu’Etienne Klein précise « Nous ne pouvons pas savoir grâce à nos seules connaissances scientifiques ce que nous devons faire d’elles ». Cynthia Fleury esquisse le processus : « Il est d’abord nécessaire d’organiser un récit du progrès, d’en définir les contours et les bénéficiaires. Ensuite vient la mise en œuvre du progrès, sa matérialisation par le biais des politiques publiques ».

L’appétit pour le progrès croît en mangeant et chaque nouvelle bouchée coûte plus cher que la précédente[8]. Déplorer que les générations actuelles soient insatisfaites de l’absence de progrès et ne se montrent pas conscientes de mieux vivre que les précédentes ignore que le seul point de repère légitime pour elles est celui de leur enfance. Plus important, lorsque le niveau de conscience, d’éducation ou d’information d’un individu ou d’une population progresse, il en va de même de ses attentes envers son entourage, personnel, professionnel, social. L’une des conséquences immédiates des formations au management dans les organisations est d’accroître le niveau d’exigence envers les managers des personnes formées. Claudia Senik indique « Notre niveau d’exigence explique directement notre niveau de frustration », sans toutefois en tirer d’enseignements dans la relation au politique et les systèmes de gouvernance.

Enfin, des besoins quantitatifs et qualitatifs que le progrès vise à satisfaire, il en est un qui revêt un caractère fondamental : la possibilité de contribuer positivement à la communauté à laquelle on appartient. « Le lien social est un paramètre déterminant du niveau de satisfaction dans l’existence » (Claudia Senik, p.50). Un modèle économique et social qui construit de l’exclusion génère de ce fait structurellement de la régression. Une stratégie politique qui se nourrit de la division ne peut se revendiquer progressiste[9].

On aurait aimé être éclairés plus avant sur ces points. Que nenni. Voilà qu’en guise de plat de résistance on nous sert une déclinaison de fariboles confinant à l’escroquerie.

« Un modèle économique et social qui construit de l’exclusion génère de ce fait structurellement de la régression »

L’armée des opposants au progrès

Ainsi, il y aurait des « adversaires du progrès, nombreux (…) qui, contrairement aux courageux tenants du progrès revendiquant une forme de rationalité, tiennent des discours faisant appel aux sentiments » (Nicolas Bouzou, p.79 et 89), des gens « qui ne croient plus en la science », un « usage déréglé du doute (…) un pessimisme emportant tout, prenant des formes multiples et dont la technophobie n’est que la plus visible » (Karine Safa, p.73 et 75), des tenants d’une décroissance synonyme de « retour en arrière» (Claudia Senik, p.54) de « repli sur le passé» (Jean Viard, p.19) et « d’une volonté d’arrêter de grandir, antinomique avec la démocratie» (Pierre-Henri Tavoillot, p.39). Des populistes, des écologistes radicaux, des anti-vax et des trolls. Des personnes que la peur rend vulnérable au « complotisme comme schéma explicatif alternatif simple et apaisant » (Karine Safa, p.73), « désespérant du progrès et cédant à l’absurde (…) emprisonnant collectivement l’imaginaire dans la perspective négative des dystopies » (Karine Safa, p.73 et 77).

Détaillons cette tartufferie.

On n’échappe pas ici au tour de passe-passe consistant à peindre l’agressé en agresseur, à qualifier de conservateurs ceux qui aspirent à un autre monde.

Un minimum d’élégance aurait conduit à reconnaître la contribution essentielle de ces soi-disant anti-progrès à des avancées majeures qui apparaissent aujourd’hui comme des évidences. Jean Viard évoque brièvement René Dumont. On pourrait mentionner Ralph Nader, Rachel Carson, Dennis et Donella Meadows et tant d’autres individus ou ONGs, vilipendés en leur temps et sans lesquels les énergies renouvelables ou la Directive Reach ne seraient encore que des vues de l’esprit.

On pense aujourd’hui à Ines Léraud, Morgane Large, Nicolas Legendre et leur combat contre les dégâts causés par le lobby agro-industriel, dont les algues vertes. Le besoin encore et toujours de faire face à la collusion des forces économiques et politiques. Et non, la dénonciation du mandat de « prévention des actions de nature idéologique » de la cellule Demeter, des mensonges d’État ou de la dissolution des Soulèvements de la Terre ne relèvent pas d’un complotisme délirant. Pas plus que la mise en lumière des centaines de millions de dollars dépensés chaque année par l’industrie pétrolière pour freiner la lutte contre le changement climatique[10].

Ce n’est pas tant le citoyen qui ne croît plus en la science mais le politique qui la détourne pour son propre agenda sapant durablement la confiance. « Dormez tranquilles braves gens ! » du nuage de Tchernobyl à la vache folle[11], sans parler du récent et fâcheux Lancet gate. Des politiques qui ignorent les recommandations répétées du GIEC depuis 30 ans. Un Président qui lors de ses vœux en décembre 2022 déclare benoitement « qui aurait pu prédire la crise climatique aux effets spectaculaires cet été dans notre pays ?». Le ministre de l’Agriculture, dont l’ex-cheffe de cabinet est désormais directrice de la communication et des affaires publiques du lobby des pesticides, qui lui emboite le pas six mois plus tard, provoquant l’ire de climatologues[12] : « On n’a pas eu des températures extrêmes, on a plutôt eu des températures normales, pour un été ». Une semaine plus tôt, le service Copernicus et l’Organisation Mondiale Météorologique (OMM) qualifiaient le mois de juin 2023 comme le plus chaud jamais enregistré, avec des températures de surface de la mer en Atlantique Nord « hors norme » et « une étendue de la banquise arctique d’une faiblesse record ».

Rappelons, comme nous l’apprend dans son excellent livre Sylvestre Huet[13], que le GIEC a initialement été créé avec l’aval de Reagan et Thatcher dans une tentative de contrebalancer l’influence des environnementalistes du PNUE ! Quelque part entre 2006 et 2009, je participais à une réunion à l’Hôtel de Roquelaure avec le Directeur de Cabinet du ministre de l’Environnement. A la fin de l’échange, l’ordre du jour traité, l’ambiance détendue et se sentant en confiance, celui-ci nous partagea cette confidence : « L’environnement, c’est bien, mais ça s’arrête là où commence l’économie. »

Les désenchantés seraient mus par la peur et se refuseraient à évoluer. Ce sont bien plutôt les tenants des modes de production et de consommation du monde d’hier sur lesquels reposent leurs profits, qui s’accrochent à un paradigme mortifère comme une moule à son rocher. Quel courage il faut pour contempler dans les yeux l’abime vers lequel nous nous dirigeons. J’expliquais l’autre jour l’ampleur de la crise climatique à des cadres financiers lors d’un déjeuner, ils me reprochèrent de leur couper l’appétit « Mais c’est très anxiogène tout ça ! ».

« L’environnement, c’est bien, mais ça s’arrête là où commence l’économie. »

« Un autre monde est possible », « Rêve général » autant de slogans et d’utopies portés depuis 50 ans. En 1975 paraissait l’inspirant Ecotopia (Ernest Callenbach, Gallimard 1975). Plutôt que de déplorer la floraison de dystopies et la solastalgie, n’en déplaise à Karine Safa, il serait autrement plus utile de s’interroger sur ce qui broie les utopies. Le 11 Septembre 1973, Salvador Allende déclarait à la radio nationale « L’humanité avance (idéalement) vers la conquête d’une vie meilleure ». Ce fut son dernier discours. Un peu de décence, de grâce !

Le progrès, mais pas à n’importe quel prix

Il ne s’agit pas de croire ou pas dans le progrès mais d’apprécier le rapport coût-bénéfice d’un progrès marginal afin de déterminer un optimum. Établir la possibilité de choix socialement acceptés en ce sens est une condition du progrès et d’un optimisme retrouvé. Traiter d’amish ceux qui questionnent le bénéfice net de la 5G est une ânerie abyssale.

La difficulté réside en ce que l’enjeu des choix revêt une dimension sans précédent : le génie génétique, l’Intelligence Artificielle, les NBIC[14] plus généralement et le changement climatique comportent un potentiel d’altération majeure et sans retour des conditions d’existence de l’humanité. Le caractère dual[15] de toute technologie renforce ce risque. Ainsi l’utilisation militaire de l’Intelligence Artificielle est l’une des plus grandes craintes du peu technophobe Elon Musk (cf. infra).

La possibilité de tout perdre (une perte infinie), quelle que soit sa faible probabilité engendre une espérance infiniment négative. De surcroît, la réglementation se révèle structurellement en retard sur l’innovation et dispose dans la plupart des cas de moyens ridiculement faibles au regard des secteurs qu’elle est censée contrôler : financiers, environnementaux, médicaux, sociétaux. Ou lorsque la réglementation existe, certaines entreprises n’hésitent pas à la transgresser ouvertement pour imposer leur modèle et jouir de leur Toute-puissance, comme l’illustrent les Uber files.

On s’est beaucoup ému en 2023 des conséquences du développement de l’intelligence artificielle. Pourtant dès 2018, Elon Musk donnait une interview[16] dans laquelle il déclarait « L’IA est une de mes craintes majeures vis-à-vis de l’avenir. Un peu moins maintenant que j’ai adopté une attitude fataliste (…) J’ai essayé de convaincre ces personnes (les politiques, Obama, le Congrès, l’ensemble des 50 gouverneurs) de ralentir, de ralentir l’IA, de réglementer l’IA. C’était futile. J’ai essayé pendant des années. Personne n’a écouté (…) Les gens ne comprennent pas comment fonctionne la réglementation c’est très lent, vraiment très lent (…). Il faut qu’il y ait un accident, des victimes, de l’indignation, une enquête, des propositions de loi et peut-être après des années enfin une réglementation(…). Ce mode de faire n’est pas pertinent pour l’IA. On ne peut pas attendre 10 ans après le moment où c’est devenu dangereux. C’est trop lent (…) Une action de bon sens consisterait à créer un comité, d’abord chargé de comprendre ce qui se passe (insight committee), puis une fois correctement informé de proposer des actions de supervision (oversight committee). »

Pour Nicolas Bouzou, ces objections ne sont que des futilités que l’on peut écarter d’un revers de la main « Le progrès n’est pas sans dégâts collatéraux, qu’il faut ensuite traiter » (p.82). L’intendance suivra donc, simple formalité. Et d’accuser ceux qui ont peur de la science, de nous mettre dans « l’incapacité à résoudre certains de nos défis comme celui de la crise climatique » (p.81). Dénonçons cette nouvelle duperie.

Sophia the robot, une Intelligence Artificielle développée par Hanson Robotics

Tout d’abord Nicolas Bouzou procède à un amalgame douteux entre sciences et technologies. Dans de nombreux cas, ce sont bien les incertitudes scientifiques sur les conséquences possibles de nouvelles technologies qui invitent à la précaution, comme l’illustre la non-assurabilité des cultures OGMs. Qu’à cela ne tienne, nous devrions adhérer au nouveau pari Pascalien ainsi proposé : croyons sans réserve à l’infinie capacité de la technologie de trouver des solutions aux maux qu’elle engendre, nous avons tant à y gagner. Vraiment ? Qui tient la banque de ce casino où il convient de sans cesse doubler la mise ? Face je gagne, pile tu perds, ou la privatisation des profits et la mutualisation des pertes.

Farce d’autant plus pitoyable, qu’en ce qui concerne la lutte contre le changement climatique l’humanité dispose déjà de toutes les technologies nécessaires. « We have the technologies. We have the science. We now need the leadership—and the courage to change course ». « La question n’est pas de savoir si nous pouvons limiter le réchauffement mais si nous choisissons de le faire »[17].

Décroître ou périr

Quant à la décroissance. Comment un tel aréopage peut-il à ce point verser dans la caricature et manquer d’en donner une définition simple et partagée, i.e. le découplage du bien-être et de la déplétion du capital naturel[18] ?. Si certains des auteurs sentent le besoin de faire évoluer l’antienne cartésienne « Devenir comme maître et possesseur de la nature », on aurait aimé qu’ils en qualifient plus avant la dynamique intrinsèque funeste consistant à penser l’humain en dehors de la nature. La satisfaction de désirs sans fin attise une ambition prométhéenne d’apprentis sorciers.

Au bancal « La sobriété m’inquiète quand elle fait dire à certains que nous devrons vivre, demain, en fonction de nos besoins et non plus de nos désirs. L’humain ne saurait être réduit à la satisfaction de ses besoins, c’est même ce qui le distingue de l’animal » (Nicolas Bouzou, p.85), on préfèrera « Il y a assez dans le monde pour subvenir aux besoins de tous mais trop peu pour satisfaire les désirs de chacun » (Ghandi).

La propagation instantanée du mode de vie des plus riches à l’ensemble des femmes et des hommes engendrerait un effondrement écologique immédiat. Ce mode de vie « non négociable »[19] est pourtant inlassablement promu par la publicité et l’imposition d’une culture dominante. « Le crime est vendu comme un idéal de vie » (Andreas Malm, Comment saboter une pipeline, La Fabrique 2020). On comprend que ça va coincer.

Lorsque Claudia Sénik dit « Mais bien sûr, l’état de santé, l’espérance de vie, le niveau d’éducation, sont forcément liés à la richesse produite », elle commet la regrettable omission d’indiquer qu’une fois dépassé un certain niveau de richesse, il existe une grande disparité entre le PIB par habitant et le niveau de performance de ces indicateurs[20]. L’espérance de vie des femmes en Italie est de 6 ans plus élevée qu’aux Etats-Unis, alors que le PIB par habitant y est inférieur de 56%. Il y avait en 2018 2,6 médecins pour 1000 habitants aux Etats-Unis, contre 4,6 en Finlande et 8,4 à Cuba.

« Le risque est le repli sur un passé même très ancien, l’obsession d’un mode de vie dépassé en réaction apeurée à un avenir dangereux et potentiellement mortel » nous dit Jean Viard. Du Samsara bouddhique aux stoïciens, n’y-a-t-il pas pourtant des enseignements pointant dans le sens d’une décroissance des désirs matériels comme vecteur de progrès personnel et collectif ?

« La propagation du mode de vie des plus riches à l’ensemble des femmes et des hommes engendrerait un effondrement écologique immédiat »

Il est surprenant qu’au sujet de la décroissance, aucun des auteurs ne prenne le soin de distinguer l’être et l’avoir, ni de mentionner la spiritualité. On pense au discours d’Harvard de Soljenitsyne renvoyant dos à dos le matérialisme du communisme et du capitalisme : « le désir permanent de posséder toujours plus et d’avoir une vie meilleure, et la lutte en ce sens, ont imprimé sur de nombreux visages à l’Ouest les marques de l’inquiétude et même de la dépression (…) Cette compétition active et intense finit par dominer toute pensée humaine et n’ouvre pas le moins du monde la voie à la liberté du développement spirituel (…) il sera tout simplement impossible de relever les défis de notre siècle menaçant armés des seules armes d’une structure sociale légaliste (…) Ce n’est que par un mouvement volontaire de modération de nos passions, sereine et acceptée par nous, que l’humanité peut s’élever au-dessus du courant de matérialisme qui emprisonne le monde. »

Lucidité et radicalité

Un autre assaisonnement nous reste sur l’estomac, à la lecture de cet opuscule. Celui consistant à assimiler, dans la prévention/remédiation des effets négatifs de l’essor technologique et consumériste, la nature des solutions à mettre en œuvre et les modalités d’action politique les promouvant. En qualifiant les dernières de radicales ou d’extrémistes, on s’exonère à bon compte d’une véritable pensée sur les premières.

« Il faut avoir conscience de la gravité du moment sans céder à l’urgence, toujours mauvaise conseillère. (…) Il y a sans doute une troisième voie, dont je mesure qu’elle n’a pas la radicalité exaltante des deux autres (…) : elle mêle un peu de conservatisme et un peu de progressisme. » (P.H Tavolliot, p.31 et 37). Pourquoi s’inquiéter, puisque « la prise de conscience et la mobilisation sont là» (C. Senik, p.52) et que « Les économistes s’accordent à peu près sur le fait que la mondialisation (…) est allée trop loin. » (C. Senik, p.56) ? Et d’ailleurs le problème est finalement assez simple. Il s’agit de mettre en œuvre une « modération volontaire », moins « répulsive qu’une sobriété pouvant confiner à l’ascétisme » (C. Senik, p.56). « Éviter ce qui est absurde et inutile dans nos vies, c’est-à-dire une lutte pied à pied contre le gaspillage » tout en laissant « le capitalisme transformer nos désirs en besoins » (P.H Tavolliot, p.31 et 24).

Devant un tel concentré d’eau tiède, on se demande si les auteurs se sont donné la peine de comprendre ce qui est en jeu ou s’ils s’astreignent à la prise quotidienne de la pilule bleue.

En août 2021, Antonio Guterres, Secrétaire Général des Nations Unies, qualifiait le rapport du GIEC « d’alerte rouge pour l’humanité, dont les signaux d’alarme sont assourdissants et les preuves irréfutables ».  Pour limiter le changement climatique à +1,5°C, il convient que les émissions de gaz à effet de serre (GES) diminuent de 7% par an jusqu’en 2050. Elles continuent de croître chaque année. La seule année de baisse a été 2020 avec son confinement planétaire : -4,6%…pour croître à nouveau de 6,4% en 2021. Lorsque j’ai quitté la banque pour rejoindre l’ADEME en 2002, on parlait de la nécessité pour les pays de développés de réaliser le « Facteur 4 », soit une baisse de leurs émissions de GES de 75% d’ici 2050 par rapport à leur niveau de 1990. Vingt ans plus tard, les émissions des pays de l’OCDE n’avaient diminué que de 3,3%[21] (une répartition linéaire de l’effort à partir de la prise de cet engagement voudrait que l’on en soit à -40%[22]). Qui est comptable de la non-atteinte de ces objectifs pris solennellement ?

Pour qui sait compter, il est une décroissance qui donne le vertige : celle de la biodiversité. L’année prochaine, l’Union internationale des sciences géologiques (IUGS) devrait entériner la reconnaissance de l’Anthropocène comme 39ème et nouvelle époque géologique. L’empreinte de l’humain sur la planète est telle qu’elle entraîne la sixième extinction de masse. Destruction et fragmentation des habitats, introduction effrénée d’espèces invasives, acidification des océans, stress climatique : les espèces disparaissent à un rythme 1000 fois supérieur à la normale (45000 fois pour les amphibiens).… Seul le talent de conteur d’Elizabeth Kolbert rend possible la lecture par le menu de ce lugubre décompte[23]. L’indice de biodiversité Planète vivante a décru de 70% depuis 1970 (p.39). Partout dans le monde, des femmes et des hommes de bonne volonté extraient des organismes vivants de leur milieu naturel devenu insoutenable pour tenter de les préserver artificiellement dans l’attente de jours meilleurs : coraux en Floride, grenouilles en Amériques latine, rhinocéros de Sumatra dans quelques zoos. Des efforts aussi louables que désespérés, en vue d’une hypothétique réversibilité des dégâts de l’Anthropocène.

« Pour limiter le changement climatique, il convient que les émissions de gaz à effet de serre diminuent de 7% par an jusqu’en 2050 »

Mais les limites ne sont pas qu’écologiques. « Alimentation, un tiers des français se serrent désormais la ceinture », titrent Les Echos, alors que le chômage est au plus bas depuis 40 ans. Les achats alimentaires ont chuté de 11,4% en volume lors des 18 derniers mois, du jamais vu depuis 1980.

S’il est un pays qui a fait du progrès une promesse ontologique, ce sont bien les Etats-Unis. Cette espérance a attiré des millions de migrants et rend supportables des inégalités particulièrement marquées. Quel symbole dès lors de voir Angus Deaton, prix Nobel d’économie ayant célébré la « grande évasion » en termes d’espérance de vie au 20ème siècle, dénoncer aujourd’hui les « morts de désespoir » aux Etats-Unis[24], conduisant au recul de l’espérance de vie de 3 ans depuis 2019, du jamais vu en Occident depuis 1918 ! Cette classe populaire d’ouvriers non qualifiés, en particulier blancs, autrefois portés par l’American Dream, aujourd’hui réduite à des addictions mortelles[25] faute de perspectives, laissée pour compte d’un modèle économique et de santé « prenant aux pauvres pour donner aux riches » (Morts de Désespoir, l’avenir du capitalisme). Après la religion et le progrès, lorsqu’il s’agit de choisir son opium, il semble que le peuple ait finalement décidé que rien ne valait l’original. « Can’t beat the Real Thing », comme nous disait Coca-Cola. Sombre requiem, McKinsey à la baguette.

La voie d’un progressisme modéré réformateur est en principe attrayante mais les cinquante dernières années dressent sans appel son échec à apporter une réponse à la mesure des forces à l’œuvre. « La plupart des politiciens défendent le même impératif moral qu’une cellule cancéreuse : il faut à tout prix continuer ce qu’on fait », écrivait Jim Harrison. Au-delà de l’aspect provocateur de la formule, un sursaut vital doit nous amener à prendre acte que continuer ainsi serait pure folie. Il convient de prendre enfin le problème à la racine et de mettre en œuvre des solutions authentiquement radicales.

L’humain au cœur

Nous l’avons vu, ce banquet ne nous aura pas rassasié pour de multiples raisons. S’il ne fallait en retenir qu’une toutefois, je soulignerai l’absence de propositions crédibles pour restaurer la dynamique vertueuse d’un progrès durable. La liste des compétences qui me manquent pour esquisser ici des solutions est longue, je ne puis m’appuyer que sur mon expérience, mes lectures et réflexions.

La question au fond n’est pas de savoir si nous progressons, c’est le cas dans de nombreux domaines, mais si ces progrès sont d’ampleur suffisante pour contrebalancer les effets négatifs de notre développement. Ne nous y trompons pas, face à la crise écologique sans précédent, ce n’est pas la Planète qu’il faut sauver mais l’Homme. D’abord parce que la nature nous survivra, ensuite parce que pour prendre soin de l’autre, il nous faut d’abord prendre soin de nous-mêmes. « Un mouvement pour le climat sans colère sociale se privera de sa force de frappe » (Adreas Malm, Comment saboter une pipeline, p.161).

Il faut une approche sociale aux problématiques environnementales. Et pour mettre en œuvre cette approche sociale, il est impératif de modifier les modes de gouvernance.

« Malheureusement la crise s’aggrave beaucoup plus et plus rapidement que la vitesse à laquelle nous déployons les solutions. Nous disposons de tout ce qui est nécessaire, à l’exception de la volonté politique. (…) Les intérêts financiers des sociétés d’exploitation des énergies fossiles ont capturé le processus de décision politique dans des pays clés et ont zombifiés autant de personnes que possibles à travers le monde avec des mensonges (…) Nous devons trouver des moyens de résoudre la crise démocratique pour résoudre la crise climatique (…) Ce n’est pas l’heure de la couardise morale, de la reddition et de l’indifférence irréfléchie au sort de l’humanité. ». Quelques mois après ces propos d’Al Gore, le Président de Total Patrick Pouyanné était élevé au rang d’officier de la légion d’honneur, à l’occasion de la promotion du 14 juillet 2023.

« Il faut une approche sociale aux problématiques environnementales » / Photo: Jeanne Menjoulet

Dans son livre enthousiasmant « Humanité, une histoire optimiste » (Seuil, 2019), Rutger Bregman tranche le débat entre Hobbes et Rousseau sur la nature de l’Homme : elle est intrinsèquement sociale et altruiste. Il renverse la croyance tenace établie depuis des siècles que « l’homme est un loup pour l’homme »[26], étaye son approche par de multiples faits historiques, debunke les best sellers de la psychologie sociale de Zimbardo à Milgram et dénonce enfin l’effet nocebo majeur du relai incessant de cette acception erronée par les médias. Si Sapiens a prévalu, ce n’est ni par sa force, ni par son intelligence mais par sa dimension sociale et collaborative. C’est ce réalisme renouvelé qui doit servir de fondement aux réformes à conduire. La première d’entre elles concerne l’organisation politique de la majorité des sociétés modernes, puisque de Hobbes à Locke, la démocratie représentative est fondée sur la nécessité d’une organisation sociale permettant de remédier à la nature intrinsèquement égoïste de l’Homme.

L’autre raison de réformer la démocratie représentative est qu’elle repose sur la conception d’une nature infiniment exploitable, désormais dépourvue de toute hiérarchie naturelle et originelle, contrairement au cosmos de la Grèce antique. C’est ce que nous expliquent Dominique Bourg et Kerry Whiteside dans « Vers une démocratie écologique » (La République des Idées, Seuil, 2010). « La démocratie moderne ouvre le désir humain, comme l’action technique à l’infini. Elle permet à chacun de maximiser son intérêt, c’est-à-dire de produire et de consommer toujours plus. (…) Ce programme méthodique de franchissement et de dépassement ne se borne pas aux seuls domaines scientifiques, techniques ou politiques. Une intolérance diffuse aux normes est en effet un des traits des sociétés modernes. (…) Nos institutions sont devenues incapables d’affronter le monde tel que les dernières décennies l’ont façonné.»

Plusieurs limites se cumulent : la non-représentation de la nature et des générations futures qui en dépendent, le fait que les problématiques environnementales actuelles dépassent les horizons temporels et géographiques de l’expérience des citoyens et de leurs représentants. Qui plus est, « la particularité de la philosophie politique moderne est de faire dériver le bien commun des intérêts de l’individu (… or) dès qu’on fait de la survie d’un être non-humain une valeur morale, elle revêt la forme d’un impératif, pas d’un intérêt.»

Bourg et Whiteside indiquent que « la question naturelle nous oblige à nous demander quels sont les acteurs les plus à même de faire évoluer la conscience des citoyens au sujet des enjeux technoscientifiques de notre temps ». Ils proposent d’évoluer vers une méta-représentativité comprenant les éléments suivants :

-Une participation citoyenne réactivée (cf. infra.) ;

-Une constitution révisée en bio-constitution afin de refléter la dépendance des conditions d’existence de l’humanité à un bon état de la biosphère. En reconnaissant les limites de la planète et la nécessité de leur gestion concertée nationalement et internationalement. Il convient de noter ici qu’une telle disposition existe déjà dans la constitution de certains États américains, dont le Montana, ayant donné lieu récemment à une très réjouissante injonction des juges au gouvernement de se conformer à ce devoir

-Des ONGs devenues de véritables partenaires sociaux, siégeant dans les instances gouvernementales et jouant un rôle dans leurs processus décisionnels, par exemple au travers d’un devoir d’audition systématique dans le cadre d’une nouvelle loi[27]

-Une Académie du futur offrant une place nouvelle au savoir scientifique dans l’éclairage des décisions publiques ; et

-Un nouveau Sénat, chargé de l’élaboration en amont de grands projets de lois servant les objectifs de la bio-constitution et ayant un droit de veto sur toute loi allant à leur encontre, sur la base des éléments fournis par l’Académie. A mandat unique, les sénateurs pourraient être des personnalités qualifiées tirées au sort parmi des listes établies par les ONGs, et des représentants désignés au hasard au sein de la population tout en assurant une représentation de la diversité de la population.

« Proposition d’évolution: Un nouveau Sénat, chargé de l’élaboration en amont de grands projets de lois servant les objectifs de la bio-constitution »

La contribution à la vie de la collectivité est un besoin essentiel, vecteur de liberté[28]. De multiples moyens existent, plus pédagogiques, plus participatifs et réflexifs pour rendre aux citoyens le sentiment de pouvoir être acteurs de leur vie, pour faire co-exister action publique et bonheur privé : budgets participatifs, votations, référendum d’initiative citoyenne, convention citoyenne/conférences de consensus, tirage au sort de représentants. Ils doivent devenir l’ossature de notre système politique et ne plus être cantonnés à la marge, ou pire utilisés comme des faux nez à l’instar du « Grand Débat »[29].  Seul un engagement authentique en ce sens permettra de s’échapper de la situation actuelle « déficitaire, génératrice de ressentiment », pour créer un cadre renouvelé et « capacitaire »[30]. Mais l’effort doit être réciproque. Il s’agit pour chacun de se donner les moyens d’identifier ce qu’il peut changer à sa mesure pour contribuer au progrès, de faire l’effort de se placer au-delà de la frustration dans une posture créatrice, de faire face, d’accepter de s’extirper du divertissement, de consentir à ce pretium doloris au titre de sa responsabilité individuelle en vue d’un à venir meilleur. Il n’est pas anodin à ce titre que le grand mouvement néolibéral de déréglementation conduit depuis les années 70 ait correspondu à un affaiblissement des mouvements populaires.

Enfin l’école. N’est-ce pas l’Institution du progrès ? Je me suis toujours demandé pourquoi on y apprenait tant de choses sur le fonctionnement du monde extérieur et si peu sur celui de son monde intérieur. Il ne s’agit plus de former des exécutants, d’inculquer des connaissances mais d’éveiller des citoyens autonomes, confiants, résilients, créatifs, joyeux.

Sur de telles fondations, j’aime à croire au progrès. Au pari de l’intelligence collective, dont la révolution numérique serait enfin l’outil. A un réel et volontaire partage du pouvoir, à des autorités redevables[31]. A une confiance restaurée, moteur d’une société en mouvement.

« Allons au jardin public, main dans la main ;

Cueillir la marguerite, qui nous revient ;

Et le sang reviendra, comme toujours, dans nos veines,

Et le sang, reviendra, un torrent, dans nos veines. »[32]

« L’avenir de l’humanité reste indéterminé, parce qu’il dépend d’elle »[33]. Quel privilège !

Rodolphe Bocquet


[1] Es irrt der Mensch, solang er strebt.

[2] La Grande Démission

[3] Il est symptomatique de voir que Suzane, artiste de 32 ans, ait éprouvé le besoin d’écrire en 2022 une chanson reprenant le titre de celle de Mylène Farmer datant de 1991.

[4] Edition de l’Aube, 2023. Ouvrage rassemblant des propos tirés des échanges ayant eu lieu lors des « Rencontres d’Entreprises et Médias ». 

[5] Nicolas Bouzou, Cynthia Fleury, Etienne Klein, Karine Safa, Claudia Senik, Pierre-Henri Tavoillot et Jean Viard

[6] On regrettera que Cynthia Fleury ait été cantonnée à ces seules sept pages. Un décompte bête et méchant de l’équilibre homme-femme dans ce recueil donne 34 pages pour les femmes et 68 pour les hommes. Soit 54% de plus en moyenne pour les auteurs masculins. Serait-ce une nouvelle manifestation du manspreading ?

[7] Aspiration au mieux-être, il est le récit collectif ayant pris la suite des religions pour résoudre l’angoisse existentielle propre à la condition humaine

[8] On parle de coût marginal croissant. Ainsi, l’énergie croît avec le carré de la vitesse, par conséquent passer 50 à 55 kmh en voiture requiert plus de carburants que de passer de 100 à 110kmh.

[9] Difficile de rejoindre Karine Safa, lorsqu’elle cite Machiavel chantre du « Divide et impera » comme une référence inspirante du progrès même si c’est sur un autre thème (cette capacité qu’elle associe à la Renaissance à surmonter la peur et à agir, qui d’ailleurs n’est pas sans résonance avec les « premiers de cordées »).

[10] Tracing Big Oil’s PR war to delay action on climate change et également le

 rapport influence map

[11] En 1990 le ministre de l’Agriculture britannique organise une opération de communication en donnant à manger un burger à sa fille de 4 ans devant la presse pour démontrer qu’il n’existe aucun risque pour la population

[12] Valérie Masson Delmotte, Christophe Cassou, et également le site de Nations Unies

[13] Le GIEC, Urgence Climat, le rapport incontestable expliqué à tous (Tallandier, 2023), p.20-21

[14] Nanotechnologies, Biotechnologies, Informatique et Sciences Cognitives

[15] Cf. Manifeste conspirationniste p.126, où l’on apprend que la géo-ingénierie climatique a aussi été pensée dans un usage militaire, notamment pendant la guerre du Vietnam.

[16] Joe Rogan #1169, interview dans laquelle par ailleurs Elon Musk qualifie, les larmes aux yeux, la poursuite de l’extraction des énergies fossiles comme l’expérimentation la plus stupide de l’humanité.

[17] Lamontagne et al. « Robust abatment », art. cit., p.290

[18] Vivre des intérêts du capital naturel au lieu de le dilapider au détriment des générations futures. Une notion reprise dans l’indicateur Earth Overshoot Day du Global Footpring Network.

[19] « The American way of life is not negotiable. » George Bush Sr, sommet de la Terre, Rio, 1992

[20] Au sein de l’entreprise Beyond Ratings, que j’ai co-fondée (maintenant filiale de la bourse de Londres), nous avons ainsi développé une méthodologie d’ajustement du PIB en fonction de la performance atteinte pour les indicateurs de développement.

[21] Donnons crédit à l’Europe des 27 qui sur cette période a réduit ses émissions de 29% (22% pour la France, 39% pour l’Allemagne, 47% pour le UK)

[22] En fait il faudrait probablement être parvenu à un niveau encore plus bas, car la réduction d’une même quantité d’émission aujourd’hui a plus de valeur que celle de la même quantité dans 10 ans. Par ailleurs, l’effort à fournir pour réduire les émissions va en croissant, nécessitant des modifications de plus en plus structurelles des modes de production et de consommation.

[23] La 6ème extinction, Elizabeth Kolbert (La Librairie Vuibert, 2014). Prix Pulitzer 2015. Extrait du prologue: « J’ai essayé de mettre en lumière ici les deux aspects majeurs qui y sont liés : celui, saisissant, des connaissances que l’homme acquiert, et celui, apocalyptique, d’une désolation annoncée ».

[24] Morts de Désespoir, l’avenir du capitalisme, Anne Case & Angus Deaton (PUF 2020)

[25] Le nombre de morts par overdose a été multiplié par 5 depuis 2000 pour atteindre 106 000 par ans en 2021 aux Etat-Unis, dont les 2/3 liés aux opioïdes synthétiques (principalement le Fentanyl).

[26] Comme nous l’apprend Jean-Claude Michéa dans Le loup dans la bergerie (Climats, 2018), cette citation n’est d’ailleurs pas de Hobbes mais de Plaute et est incomplète « L’homme est un loup pour l’homme, jusqu’à ce qu’il le connaisse ». La citation complète revêtant un sens radicalement différent.

[27] Elles pourraient être sélectionnées selon certains critères d’éligibilité, par tirage au sort ou par décision de jurys citoyens.

[28] Voir Armatya Sen, L’économie est une science morale (La Découverte, 1999)

[29] Cf. interview par la Fondation Jean Jaurès de l’ambassadeur Didier Le Bret, auteur de Rendez les doléances ! Enquête sur la parole confisquée des Français (JC Lattès, 2022)

[30] Pour reprendre les termes de Cynthia Fleury dans Ci-gît l’amer (Folio Essais, 2020) sur les conditions de dépassement du ressentiment individuel et collectif

[31] Quel triste spectacle à ce sujet que l’attitude actuelle de la commission Européenne dans le cadre du scandale Von der Leyen/Pfizer

[32] Bertrand Belin, Marguerite, « Tambour Vision » (2022)

[33] Les Deux Sources de la morale et de la religion (1932)

1 Commentaire(s)

  1. Intéressant et assez dans l’air du temps, mais une petite erreur d’inattention il me semble sur le renvoi n°8 : à mon avis, il faudrait inverser et dire « passer de 100 à 110 km/h est plus énergivore que passer de 50 à 55 km/h » . C’est même 4 fois plus énergivore si l’on ne prend en compte que la masse du véhicule comme opposition à « l’accélération » ; si, en plus on prend en compte la surface frontale du véhicule comme autre résistance (de l’air) à « l’avancement » du véhicule, c’est encore 4 fois plus énergivore. En tout 8 fois plus énergivore.
    (désolé, car j’ai cru comprendre que cet « A Lire »-ci, n’était peut-être pas le bon pour ramener sa « science  dure »).
    A débattre.

    – énergie cinétique : https://www.google.com/search?client=firefox-b-d&q=r%C3%A9sistance+%C3%A0+l%27acc%C3%A9l%C3%A9ration

    – freinage de l’air : https://www.google.com/search?client=firefox-b-d&q=r%C3%A9sistance++a+l%27avancement+dans+l%27air

    Sinon, la solution proposée ici au problème écologique reste dans la cadre du système capitaliste qu’il faut aménager (drastiquement peut-être) et non pas changer. Simple solution de « temporisation permanente » ? (ça plairait pas à Trotski).

    Dans les pays capitalistes, la course à la science et à la technologie des entreprises vise d’abord et essentiellement (par essence) à être concurrentielles sur le marché, et donc à surpasser commercialement les concurrents nationaux et internationaux. Etre sans cesse le meilleur pour être sans cesse le plus riche ! La révolution permanente, quoi ! Trotski serait content.

    Dans les pays communistes, la course à la science et à la technologie vise, pour beaucoup, à se défendre, se protéger contre les pays capitalistes anti-communistes (dont bien évidemment l’abjecte et agressive Amérique). Pays capitalistes dont la maîtresse loi est la loi du marché. Cette attitude défensive (rang de réaction) des pays communistes tend à privilégier des changements par sauts….

    A titre d’information pour mieux connaître mr Bocquet : https://smartlink.ausha.co/tomorrow-now/2-rodolphe-bocquet-transition-ecologique-que-doit-on-reellement-attendre-de-la-finance

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