« À tous ceux qui ne veulent rien comprendre au vote Trump »
Le 14/11/2024 par Harold Bernat

L’élection de Donald Trump est une nouvelle leçon infligée à la société du spectacle politico-médiatique moralisateur, qui n’a eu de cesse de mépriser le vote populaire, les fameux « déplorables », au nom d’une bien-pensance prétendument progressiste et tolérante. Avec le vote Trump, les travailleurs américains qui souffrent du déclassement et de l’inflation se sont offert une sorte de déglingue brutale, un défi au « système » qui les a paupérisés et relégués, notamment sous les administrations démocrates Clinton et Obama. Cette trahison des classes populaires par les élites globalistes résonne fortement en France, où le RN se retrouve au plus haut exactement pour les mêmes raisons. Analyse incisive d’un vote de classe par notre camarade Harold Bernat
Bad publicity is good publicity. Nous étions en novembre 2016, il y a déjà 8 ans. Donald Trump ne connaissait rien à la politique en 2014, pouvions-nous lire à l’époque. Donald Trump is the winner ! Telle fut sa réponse du peuple américain. Donald Trump n’est pas acceptable en 2024, il ne l’était pas non plus en 2016. Indigne Donald Trump ? N’oubliez pas, juges de la petite morale et du goût, de faire vos ablutions dans le grand bénitier de la gauche divine, oui tout à fait, celle qui montre du prolo au cinéma, au festival de Cannes, entre deux coupes de champagne. Le peuple des États-Unis, par deux fois, a voté, distingué lecteur. La démocratie spectaculaire-marchande, celle qui a aussi fait Macron le faux et toutes les saletés que nous subissons socialement, en France, depuis des années, la démocratie dis-je est passée par là. Plutôt deux fois qu’une. « La récidive » titrait Libération ce jeudi 7 novembre, en vous expliquant, ne riez pas, que Trump c’est le « violent protectionnisme » alors que Harris c’est « l’économie de marché ». Les moins endormis ont, depuis une grosse semaine, l’impression de voir repasser les plats, les mêmes qu’en 2016, les mêmes qu’en 2008. J’ignore si le goût de la dialectique s’enseigne mais il est nécessaire pour comprendre ce qu’il se passe. À défaut, nous voilà condamnés à parcourir en boucle les limbes moralisatrices de l’affliction amnésique dans une stérilité politique qui n’est plus à démontrer.
J’ai donc décidé de rouvrir les archives, de retrouver le temps long de la discussion critique. Cela suppose également de reprendre le travail d’écriture, celui qu’il ne faut jamais abandonner sous peine de finir en causeur médiatique ballotté au gré des commentaires insignifiants de la politique spectacle. En 2016, j’écrivais ceci : « Pour comprendre la cascade de réactions négatives qui succèdent médiatiquement aujourd’hui à l’élection de Donald Trump, il serait bon de se souvenir de la cascade de réactions positives dans les heures qui suivirent l’élection de Barack Obama« . Le 5 novembre 2008, sur un blog du Monde qui n’a jamais eu l’insignifiant honneur d’être mis en avant, j’écrivais un article intitulé « Rien ne va plus, les jeux sont faits« . Ce court texte était une réponse à un article publié le jour de l’élection de Barack Obama sur le site du Monde, un des phares du bon goût raffiné à la française. Le titre de l’article du Monde daté du 5 novembre 2008 était « Un 11 septembre à l’envers ». Rien que ça.
Je reproduis ici le le texte de 2008, dans son jus. Le style est un peu rugueux, un tantinet brutal. Je viens de la critique profane sans filets qui n’est pas en odeur de sainteté chez les mondains, et je m’en porte bien. Il n’y a pas de pensée dialectique sans une compréhension des déplacements internes de la critique qui se frotte à ce qu’elle attaque, ce qui la déplace en retour. Les antinomies de valeurs figées – les bons démocrates et les méchants républicains, les bons progressistes et les méchants réactionnaires, les bons européistes et les méchants populistes – sont toujours un frein à la compréhension de ce qui nous arrive. Que la gauche soit aujourd’hui globalement incapable de penser dialectiquement est une des raisons de son naufrage pathétique et pour tout dire fatal.
« Rien ne va plus, les jeux sont faits » (2008)
« Pour Frédéric Martel, l’avènement de Barack Obama restera comme « une date positive » de l’histoire contemporaine, une sorte de « 11-Septembre à l’envers » » (« Un 11 septembre à l’envers », Le Monde, 5/11/2008) Non. Distinguons deux choses : d’un côté, l’élection de Barack Obama, les larmes de Jesse Jackson, l’espoir de la minorité noire américaine ; de l’autre, une campagne de publicité planétaire, une promotion du « rêve américain » hissé, en une nuit satellitaire, au statut de modèle absolu pour tous les peuples de la terre. Un modèle économique moribond, une façon d’administrer le monde aberrante, une politique de guerre économique sans limites, tout cela relustré par l’image renaissante de Martin Luther King. Il fallait y penser. Non pas qu’il y ait là quelques stratégies hautement cyniques (quoique…), non pas que tout ce grand cirque de la rédemption états-unienne soit une énième saison du grand nanar planétaire (déjà écrit de longue date).
Non, l’affaire est beaucoup plus triviale : show must go on ! Et pour vendre le show tout est bon, y compris (et j’ose dire surtout) une des causes les moins contestables des revendications politiques du siècle : la reconnaissance des minorités ethniques dans ce pays continent et son histoire ségrégationniste. Dans le fond, on aimerait tous verser une larme authentique et suivre le bon principe de Robert Zemeckis : ne plus douter mais croire. Mais la décision est sans effet : nous n’y croyons plus. Il n’y aura pas de rédemption, pas de nouvelle ère mondiale d’un pacifisme enfin oecuménique. Ces niaiseries ne changeront pas la donne et la donne est viciée. Plus la donne est viciée et plus il faut enrober le spectacle de ce jeu en trompe-l’oeil de causes totales, absolues, indiscutables. De pseudo oppositions. Les ressorts de l’écologie sécuritaire, de la mise sous tutelle du politique par une avalanche de mesures correctives ne diffèrent pas de ce qui fera advenir, dans le miracle d’une orgie planétaire de symboles à haut pouvoir de fascination (tous plus puissants les uns que les autres), la nécessité d’une nouvelle pax America. Pour quelle raison supérieure faudrait-il se mettre à croire au « rêve américain », cette idée nuisible de somnambule ? En définitive, le choix est simple : soit le rêve avec Robert Zemeckis et Barack Obama, soit le réveil un lendemain de cuite. « Un 11 septembre à l’envers » et un valium. »

Huit ans après cette orgie de belles images, en 2016, le show politique a soudainement muté. Il ressemblait moins à un valium métissé qu’à un grossier suppositoire monochrome. Cette fois, la majorité n’exprimait plus le bon goût des minorités pour les élites new-yorkaises. Il faut dire que l’administration Obama n’avait pas trouvé opportun de juger, aux plus hauts sommets de l’État, les responsables de la crise financière de 2008 qui plongea des pans entiers de la société américaine dans la misère sociale et économique. Cette administration porteuse de tant d’espoirs, une fois les larmes séchées, est très vite passée à autre chose, en toute sérénité. La guerre, par exemple, ou Guantanamo et ses multiples violations des droits humains fondamentaux. Sans quitter le bon goût et le métissage, il va de soi. Son totem d’immunité. En 2016 déjà, si l’on pratiquait un peu la dialectique dans les écoles de journalisme, les causeurs ulcérés de l’arrivée au pouvoir du vulgaire Trump auraient pu parler du retour du négatif sur la scène de l’histoire. D’une réaction en miroir. Il faut dire que l’orgie de glose pré-mâchée sur la victoire d’une femme d’ancien président à la présidence des Etats-Unis, après celle d’un homme de couleur, n’a pas eu lieu. Elle n’a pas eu lieu non plus la semaine derrière. Mais l’heure n’était pas, en France et pour France culture, à de telles vulgarités en 2017. Les Français se devaient de montrer au monde entier ce qu’était le bon goût et la juste mesure, le « en même temps » équilibré et la philosophie en politique. Ils devaient tenir leur champion. En somme, le Français bien éduqué se devait de montrer au monde entier – y compris aux africains subsahariens, aux rednecks surarmés bas du front, et aux ours polaires – son raffinement politique. C’était le grand moment Macron.
L’oligarchie financière, les ouvriers appauvris de la rust belt, l’obscène inégalité dans la répartition des services et des biens, les interventions bellicistes désastreuses, les châtelains de Washington, tout cela ne pouvait tenir lieu de raison suffisante au mauvais vote en 2016. Vous pouvez faire ce que vous voulez… mais votez Hilary Clinton. On connaît le refrain en France, cela fait déjà trois fois qu’on nous le sert, en attendant avec gourmandise la quatrième. Les bonnes âmes se pressent : démocratie donc Macron. Cogito progressiste indiscutable. Ne défendons-nous pas les droits de l’homme et le métissage ? Ne sommes-nous pas, par nature, contrairement aux bœufs américains trumpisés, du bon côté de la bienséance ? Du bon côté du bon goût ? Nous sommes français, n’est-ce pas. Au-delà des basses considérations sur le travailleur pauvre américain qui sent bien qu’on se fout de sa gueule avec le métissage globaliste étant lui-même bien souvent métissé, nous avons pour nous le sens d’un certain « esprit ». Sus aux extrêmes !
Il faudrait d’ailleurs faire un sort aux fameux castors. Il ne s’agit pas simplement d’un choix pas défaut mais d’un choix plein et entier. Ce que l’on oublie trop souvent. Le choix de ne pas choisir, de ne rien faire pour éviter que l’alternative se pose encore et sans fin. Double intérêt pour la gauche divine, les fameux soc-dem et leurs satellites mondains : valider l’existant et sauver la bonne morale ; ne pas s’opposer dans le monde réel, les places sont bonnes, tout en sauvant sa bonne conscience dans un monde idéal, question de salut. Essence et ressort de la social-démocratie faux cul. « Que voulez-vous, c’est à contrecoeur que nous avons revoté Macron. Mais avions-nous un autre choix ? » Bourgeoisement planquée et donneuse de leçon, cette engeance maligne qui a vassalisé la France depuis des décennies, qui a transformé notre pays en un pot de miel pour globalistes ou un pot de chambre, l’image est à discrétion, fonction de l’orifice, Bruno si tu nous entends, ne veut surtout pas perdre son beau privilège moral. Elle serait même prête à revoter Hollande pour le conserver si le péril extrême était une nouvelle fois aux portes du pouvoir. Le titre de Libé est déjà dans les tubes pour 2027. Hollande, lui, y croit. Pourquoi s’en priverait-il d’ailleurs ? Dans l’entregent parisien, le principe asilaire de l’homme à destin prévaut. Il a même été réélu député, c’est beau, alors qu’il a fait Macron le faux, Macron l’éborgneur, Macron le traître aux intérêts de la nation. C’est tellement beau que cela passerait même inaperçu. « Nouveau front populaire », n’ayons peur de rien, le progressisme est à ce prix. C’est aussi à cela qu’on le reconnaît. Hollande ou un spectre de même nature, une chimère qui fera en sorte que rien ne change : vassalisation, paupérisation, humiliations nationales, UE. Les sans-dents, écrasés, pauvres, humiliés, on s’en tamponne. Qu’ils viennent à mal voter, on sera là par contre pour leur donner une nouvelle leçon de bon goût. J’imagine même, dans mes cauchemars, une cellule de crise avec des réinformateurs professionnels neuneus payés sur fonds publics pour sauver la France du fascisme à venir. Qu’une partie de ses fonds aient pu être justifiée par la décapitation d’un professeur de l’Education nationale ne relève pas, hélas, de la science-fiction. Ces bonnes manières d’apparatchiks dominants ont tué la gauche. Il suffisait de voir la mine grotesque de François Hollande, le futur cocu qui a fait Macron réélu par la gauche faussement populaire, à l’heure de reconnaître la victoire de Trump en 2016. Une certaine idée du ridicule à la française. Doigt en l’air et macarons. Une petite honte nationale aussi, ayons tout de même l’honnêteté de le dire.

Pour respirer un peu et sortir de ces courtisaneries pathétiques, bien françaises, pour oser un autre regard sur le vote Trump, dans ce contexte politique et pas sur Mars, un vote qu’il est numériquement juste de qualifier de massif, ouvrons le texte d’un russe, Nicolas Berdiaev (1874-1948). Il va de soi que les mécaniques automatiques d’interprétation qui ne pensent pas mais aiment voir des travailleurs pauvres au cinéma classeront notre homme dans le wagon « penseur réactionnaire », avec Dostoïevski et Nietzsche. Il se trouve pourtant que question anthropologie politique cet homme s’y entend aussi bien, voire mieux, qu’un militant qui invente le type d’homme qui colle à la société idéale qu’il fantasme derrière son écran plat. Je n’y suis, hélas, pour rien. Accusez l’homme plutôt que l’interprète. Vous pouvez aussi jeter un oeil sur l’histoire, quelques enseignements sur les ressorts de la révolte des peuples y sont consignés. Mais quel rapport entre le vote Trump aux Etats-Unis et la lecture du russe Berdiaev ? Pour répondre à cette question, il est nécessaire de sortir de la pensée binaire. En somme d’ouvrir un livre, en l’occurrence « L’esprit de Dostoïevski » (Editions R&N, 2024).
Intéressant de constater à quel point le vote Trump est associé à une forme de démence par les socio-démocrates. Vote jugé de mauvais goût, brutal et insensé sans que ce choix ne soit jamais rapporté, ou très rarement, à une forme de volonté libératrice d’une technostructure. Mais se libérer de quoi ? Et pourquoi cette volonté prend-t-elle cette forme ? Toutes les raisons critiques sont recevables, évidemment. Trump incarne le capitalisme dans son obscénité assumée, il gavera ceux qui se gavent déjà, il affaiblira toujours plus le social, car le social n’existe pas pour Trump. Sauf que le ressort du vote n’est pas là. Les chiffres sont têtus. La différence entre la « Harris Coverage » et la « Trump Coverage » est massive. 84 % de couverture favorable pour Harris, 89 % de couverture défavorable pour Trump. Ce ne sont pas les classes populaires qui assurent la couverture médiatique. N’est-ce pas ? Quand on parle de la société du spectacle politico-médiatique, nous devrions toujours dire société bourgeoise du spectacle politico-médiatique. Le populo qui trime, le travailleur pauvre, n’est pas invité à se représenter lui-même. Cela constituerait d’ailleurs une affirmation de puissance pour lui. C’est bien cela qui est pathétique et faux dans le tourisme social qui met en scène le populo. Une mise en scène bourgeoise à destination des bourgeois sur le dos de ce dernier. On peut même en faire carrière. La conclusion est simple et elle correspond en tous points à l’analyse faite par Berdiaev des Carnets du sous-sol de Dostoïevski.
L’homme a la fâcheuse tendance pour ses maîtres de l’heure, quelles que soient les situations historiques et sociales dans lesquelles il barbote, de vouloir affirmer une volonté indépendante. En toute logique, cette affirmation est inacceptable pour l’anthropologie de gauche qui aura tôt fait de voir en elle un principe irrationnel et réactionnaire. C’est que cette anthropologie a besoin d’une métaphysique de l’homme souffrant, d’une ontologie, d’un discours sur l’être de l’homme pauvre et dominé. Alors que l’on présente à l’homme socialement dominé le vote bien raisonnable, bien juste, bien équilibré, on ne fait, en définitive, que lui confirmer le caractère raisonnable, juste, équilibré de sa situation. On ne mesure pas la violence sociale de ce type de moralisation du vote populaire. Ce qu’il vit est injuste, totalement déséquilibré, délirant et faux. Il le sait dans sa chair et quelle que soit sa couleur de peau, n’en déplaise aux rentiers du chromatique. Là est l’immoralité de sa situation. Cette immoralité est recouverte par la moraline du bon vote, progressiste, tolérant, ouvert. Métissé. Quand j’écris « on » ne mesure pas, il faudrait tout de même apporter une précision. Il s’agit bien du « on » de la bourgeoisie qui s’en tamponne parce que ça se passe très bien pour elle. Son mépris à l’égard du populo n’a d’égal que ses certitudes sociales. Symptôme de classe, rien de plus. Une violence colossale, refoulée, qui finit par exploser en choisissant ce qui apparaît comme une puissance de résistance. Fight ! Fight ! Fight ! Et les bobos moralisateurs dits « de gauche », tendance vert grenouille ou rose bonbon, d’en rajouter une couche sans rien comprendre : « Trump le cancer », « Trump le poison », « Trump le mal absolu ». Sans compter le nombre incalculable de sottises sur la réinformation par des gens qui ne travaillent pas et parasitent les institutions publiques en s’invitant aux bons cocktails.

Mais allons un peu plus loin. Réinformation de quoi ? De quelle réinformation a besoin l’homme qui estime qu’on vient lui dicter ce qu’est un bon vote, un vote juste, un vote raisonnable alors que l’inflation explose et que 90 % de la couverture médiatique vous explique à longueur de journée qu’il ne faut surtout pas choisir une alternative. Qu’est-ce qui est en jeu ? Sa raison ou sa liberté, ses informations ou sa volonté ? Qu’est-ce qui a l’air de plus déranger ? Le prêche oecuménique sur les grandes valeurs de l’humanité avec Obama qui a déjà donné ou une sorte de déglingue brutale avec Trump qui se présente comme un défi au « système » en parlant directement aux travailleurs pauvres, les grand oubliés de l’administration Clinton et Obama ?
Comme le rappelle à juste titre Rick Fantasia, dans un article du Monde diplomatique de novembre 2024, « au cours du demi-siècle écoulé, l’un des principaux exploits de l’idéologie néo-libérale a consisté à éclipser de l’imaginaire politique américain la figure du travailleur. » Les droits du consommateur ont fait partie des grands mantras du clintonisme. « Droit de choisir, d’obtenir un crédit, d’acheter à toute heure, de se faire livrer sur le pas de sa porte. » Rick Fantasia, auteur Des syndicats domestiqués. Répression patronale et résistance syndicale aux Etats-Unis (Raison d’agir, 2003), rappelle que Trump se présente toujours comme le meilleur président pour les travailleurs. Son colistier, James David Vance met d’ailleurs en avant son origine pauvre dans les Appalaches. Son livre, Hillbilly Elégie (Livre de poche, 2018) raconte comment il s’est sorti de la misère en tant que capital-risqueur. Une sorte de parcours survivaliste où il s’agit d’éviter « des méchants et horribles personnages qu’ils nomment immigrés, démocrates, experts, universitaires, gauchistes, progressistes ou communistes. » Il est entendu que la réalité des politiques sociales, leurs ressorts, restent volontairement masquée. Le travailleur est convoqué dans une narration héroïque. Là est bien l’imposture sociale du trumpisme. Mais cette dissimulation masque moins que ce qui la précède. D’autant plus qu’elle ne s’accompagne pas d’une couche de moralisation sur le bon vote « progressiste ». Avoir fait passer la liquidation de la figure du travailleur pour un progrès, là est l’imposture originale des démocrates américains et de façon tout aussi évidente de la sociale-démocratie convertie au dogme du libre-échange. L’UE n’aura d’ailleurs servi qu’à cela, avec le parti socialiste qui a fait Macron en tête de pont. La concentration idéologique de la haute fonction publique française a fait le reste depuis des décennies. Ne restait plus qu’à créer de toute pièce le monstre repoussoir FN-RN pour faire voter en cadence la liquidation progressive des protections qui donnaient aux travailleurs une certaine sécurité et à construire les institutions anti-démocratiques UE pour échapper aux plébiscites populaires. Ce sont pourtant ces mêmes individus qui viennent nous expliquer aujourd’hui que le trumpisme est une horreur. Il n’est pourtant que leur image renversée dans un miroir. Nous n’avons pas à accueillir ses tartuffes avec bienveillance. Ils ont préparé la liquidation de l’idée même de République sociale, ils ont détruit en grande partie le tissu économique et créé les conditions d’une guerre civile en France. Ils sont comptables, nous les savons.
Toutes les précautions s’imposent évidemment lorsqu’il s’agit de comparer les Etats-Unis et la France (rapport à l’État, à la religion, à l’espace) mais une chose est certaine : la même morgue et le même déni accouchent des mêmes défaites sociales. Insulter Trump a en outre ceci de commode : cela permet de détourner à peu de frais l’attention du vrai problème de fond, à savoir la trahison des classes populaires par les élites globalistes. Ne reste qu’une bouillie identitaire qui fait peine à voir et qui n’explique rien. La lecture du vote Trump en termes de minorités ethniques est d’ailleurs totalement inepte puisqu’il a progressé sur tous les fameux segments de la population américaine. A l’exception des femmes surdiplômées, ce qui, en passant, valide parfaitement la thèse de la conflictualité de classe.

Le bêtisier de Macron sous coke ou amphétamines, ses délires récents sur les carnivores et les omnivores, valent largement ceux de Trump. Nous ne sommes pas là pour discuter de la stupidité affichée des uns et des autres (ou nous n’en sommes plus là) mais pour comprendre les dynamiques profondes qui font que les classes populaires votent massivement Trump. Si le RN est aussi haut en France, c’est exactement pour les mêmes raisons. Une stratégie minoritaire ethnique largement perdante chez la gauche anti-capitaliste – anticapitaliste sur le papier mais globaliste UE dans la réalité de sa pratique politique et de ses subventions. Une extension des droits à consommer n’importe comment et n’importe quoi chez les socio-démocrates qui signent à tours de bras des accords de libre-échange délétères. Un discours nationaliste qui démembre d’une main ce qu’il flatte de l’autre. La lutte sociale ne sera jamais l’apanage des franges les plus droitières de l’échiquier politique. Sauf que la trahison des classes populaires, couplée à la recherche d’une volonté indépendante chez des peuples dominées, volonté indépendante qui n’a que faire des petites leçons moralisatrices des nantis, fait le trumpisme.
Von der Leyen et ses hobereaux prussiens, corrompue et méprisante à souhait, ne représente absolument pas les Français. Le fait qu’elle se ballade aux côtés de Macron le faux est beaucoup plus inquiétant que Trump qui a été élu par le peuple américain sans aucune contestation possible. Il faut partir politiquement de là. Tout le reste sera perdant et mensonger. Que certains puissent faire des carrières lucratives dans cette fausseté n’est pas l’affaire des gens qui galèrent. Plus de volonté indépendante et moins de simulacres, tel peut être le début d’une ligne politique sérieuse.
Harold Bernat
Merci Harold, çà fait du bien par ou çà passe….. Et merci de bien préciser LES classes populaires car tout le problème vient de là à ‘gauche’.
J’ai bien connu cette époque ou chez les petits bourgeois révolutionnaires gauchistes LE prolétaire était un dieu vivant. Période ou ils rêvaient d’une dictature (et pourtant Hitler, Mussolini et Franco n’étaient pas encore moyenâgeux) oui mais pas n’importe laquelle, une dictature PROLETARIENNE. Mais attention déjà à cette époque pas n’importe quel prolétariat, non il fallait un bon prolo qui travaille dur, un bon prolo qui aura sa médaille du travail et crèvera dès sa retraite si il y arrive. Moi, je ne faisais pas parti de cette glorieuse classe laborieuse, je faisais parti du sous prolétariat, un sale individu qui ne méritait rien que du mépris (le grand Karl avec son poto Hengels n’ont pas eu de mots assez durs pour nous désigner) on peut dire que maintenant à « gauche » on retrouve le même discours à propos des livreurs de pizzas et autres auto entrepreneurs qui ne sont qu’un ramassi de traitres à LEUR classe car ils sont des petits patrons qui s’ignorent. Oui, ils triment dur pour des clopinettes mais ce ne sont pas des vrais prolos eux. Même à l’extrême gauche il ne fait pas bon dire qu’on est au RSA ou assisté autre que chômeur, car oui le chômeur on va le défendre mais la sous gueusaille qu »elle crève (d’ailleurs personne ne relève que vivre du RSA est mission impossible) Augmenter le SMIC oui, prendre soin du chômeur oui, mais augmenter le RSA personne n’y pense. A gauche tout comme à droite il y a les bons prolos et les autres, les fainéants, les assistés, toute cette graine de délinquants qui préfèrent voler plutôt que de se faire voler. Et à gauche comme à droite ils se sont bien entendu lorsqu’ils ont jeté le bon prolo aux oubliette de l’histoire et de le remplacer par le BEAUF.
Le beauf est définitivement perdu, on ne peut plus rien pour lui d’ailleurs LA preuve il vote RN, il vote pour des bourgeois qui ne le défendront pas, des bourgeois qui l’exploiteront, des bourgeois qui le méprisent, des bourgeois qui flattent leurs plus vils sentiments, bref ils votent pour des fachos qui ne tiendront aucune de leurs promesses c’est vous dire à quel point le beauf est c.. aussi abruti et aviné que les bouseux, d’ailleurs tout çà c’est du pareil au même, de la gueusaille rien que de la gueusaille….
Mais attention les rangs de la gueusaille grossissent et bien malin celui ou celle qui peut prédire de quoi demain sera fait. Il n’y a pas que les lendemains qui chantent…….On est là, on est là…….