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« Peut-on encore débattre du féminisme à gauche ? »Avec Véra Nikolski et François Bégaudeau
Émission du 15/04/2025
Pour le retour de L’Explication sur QG, Aude Lancelin et François Bégaudeau ont reçu Véra Nikolski, essayiste et autrice de Féminicène (Fayard), pour un échange sans détour sur les tensions qui traversent le féminisme contemporain. Pris entre urgence militante et manque de compréhension des forces à l’œuvre, le mouvement peine à ouvrir un débat serein en son sein, notamment à gauche, où toute critique se voit vite moralement disqualifiée.
Au cœur de la discussion : la manière dont le capitalisme aurait absorbé les revendications féministes, transformant la domination patriarcale en domination économique. Le débat aborde aussi les fractures autour de l’écologie politique, qui alimente la crainte d’un monde décroissant plus dur et inégalitaire, favorisant les régressions pour les femmes. Intersectionnalité, récupération médiatique des luttes, tensions inter-culturelles et religieuses pesant sur les femmes: autant de thèmes abordés avec exigence et sans tabou. Un échange passionnant à ne pas manquer sur QG !
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9 Commentaire(s)
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C’est un niveau de dialogue qui est vraiment très rare. Je n’étais pas un fan de Bégaudeau mais son niveau de lecture et d’analyse m’impressionne. Un échange hors du commun. Merci !
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Très belle image, très lumineuse !, des deux intervenants : Aude L. et François B. , de « L’Explication » de demain. 🙂À suivre …
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AH VOILÀ ! C’est exactement le genre d’émission qu’on adore, bravo Aude et François, cette invitée est pour moi une superbe découverte ! J’espère que son livre sortira en poche.. J’adhère totalement à son matérialisme historique et ça m’a gentiment énervée car elle a dit tout ce que je pense, en mieux formulé, évidemment. Mon double académique, haha. Je l’ai adorée. Hâte de lire son livre. Ou alors je pourrais peut-être le trouver d’occas (c’est cher, les gros livres). J’ai un faible pour les gens qui ne se soucient pas du qu’en dira-t-on mais qui s’obstinent à observer les choses comme elles sont, sans chercher à les tordre pour les faire rentrer dans un moule ou un autre. Qu’elle plaise à Bastillé, bah, tant pis, tant mieux, et alors ? Ce « campisme » n’est-il pas d’une puérilité affligeante ? En tout cas, MERCI, j’adore ! Véra Nikolski, je ne vais pas oublier de suivre ce qu’elle fait, désormais.
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4ème Explication très intéressante ; le livre que je découvrais comme son auteur Véra Nikolski : grande classe jusqu’à son accent ( de l’Est ? 🙂 ), avait été lu avec attention et finesse par AL et FB, et sa thèse explicitée : l’émancipation des femmes découle des progrès matériels, sur tous les plans, se défend efficacement.
On suppose néanmoins que fors le « féminisme des doléances » que VN déplore, les luttes féministes opèrent des bonds en avant supplémentaires non négligeables sur le plan des idées et partant, des faits …
Là où j’inscrirais un bémol à partir d’un exemple personnel, c’est concernant « la sphère juridique et la sphère morale » actives et efficaces avec #metoo mais qui ont leur écueils : dans mon entourage, deux hommes assez jeunes 42 et 49 ans, s’interdisent toute approche de leurs collègues femmes, par crainte des suites judiciaires dont ils ont été témoins.Pour revenir au livre commenté, il est question, entre autres progrès de ceux de la médecine ( antibios en particulier et on l’imagine, vaccins ) et cela m’a fait penser que, si Susette Gontard, – la bien-aimée du poète –, avait échappé à la rougeole de ses enfants qu’elle soignait, Hölderlin ne serait peut-être pas devenu fou de douleur et aurait approfondi son oeuvre philosophico-poétique pendant encore les longues années qui lui restaient à vivre.
F. Bégaudeau rappelle à V. Nikolski sa citation « Des Femmes puissantes », ( toutes libérales ! ) , de Léa Salamé ; son titre, cette dernière l’a emprunté ( sans le dire à ma connaissance ) à Marie N’Dyaye et à son livre « Trois femmes puissantes » mais les femmes élues dans ce cas-là, le sont selon des critères tout autres.
M’ont plu « Les esclaves énergétiques » 😉 ; dans un sujet tv, hier, on assistait, – comme les ouvriers en orange, épatés, à l’arrêt -, à la construction d’immeubles en imprimante géante 3D qui en donnait un exemple admirable !
Pour ce qui est du « capitalisme fascisant », vu aussi hier, l’Académie d’Harvard dans le Massachusetts ( vieille de + de 3 siècles ! ) à laquelle Trump coupe toute subvention et dont il exige qu’elle censure le terme « égalité » et tous ceux qui en découlent. De même que d’un trait de plume, il a effacé le droit de près d’un siècle à l’IVG…
Ceci pour parler des retours réactionnaires et de la nécessité de la vigilance qu’illustre, entre autre combattant.e.s des droits, les féministes.Comme le remarque très justement François Bégaudeau, mais ce ne sera pas le sujet du débat car ça ne l’est pas du livre, « le facteur colonial et impérial » a déterminé les retards qu’on observe d’un pays ou d’une région à l’autre.
Vient alors ce questionnement proposé par Aude L. sur la supposée ou avérée (?) indulgence des féministes de gauche à l’égard du « patriarcat musulman » et de de « l’Islam radical » qu’elles se refusent à dénoncer ( pour ne pas désespérer l’antiracisme… ).
C’est davantage FB qui va parler ; il aborde donc « les viols de Cologne » effectifs, liés à la frustration sexuelle, mais liés aussi à l’acool, ou motivés par le vol de portables, et dont on sait quelle récupération « religieuse » en a été faite par l’écrivain Kamel Daoud incriminant ses frères Algériens ; lequel KD est un proche de Boualem Sansal, dont on peut évidemment souhaiter, au nom de la liberté d’expression, qu’il soit libéré de sa peine d’emprisonnement, mais sans faire l’impasse sur le pourquoi de sa condamnation : son « redessinage » 😉 de la frontière de l’Algérie, côté Maroc.
Car en tant qu’écrivain pour le premier, ou journaliste pour le second, ni lui, ni KD n’ont jamais été inquiétés par la censure pour leurs écrits publiés en Algérie.
Ceci pour que, sous prétextes ou faits de « stéréotypes de genre », ne s’amalgament pas hâtivement l’Iran qui censure et pend ses opposants ou ses déviants, et l’Algérie qui n’a pas condamné ni à fortiori exécuté quiconque depuis des lustres, ni ne persécute ses ressortissants …
Et en France, pour que ne s’expose pas sans frein l’islamophobie d’une Fourest, dont les barbus sont l’idée fixe !, comme de ses confrères Francs-tireurs… Car, oui, dans une large mesure « les luttes ( anti-racistes, féministes, écolo… ) « vont de concert ». Il s’agit, non de s’interdire de réfléchir aux limites de telles luttes, à leurs points aveugles, mais sans doute de hiérarchiser les priorités pour en surmonter les contradictions, au moment de l’action.Pour revenir à Véra Nikolski, l’invitée qui nous a captivés, elle envisage en cas de malheur, tel que le retour à un monde qu’elle appelle avec originalité « plus rustique » dû à l’asséchement des « ressources » et à des « vents contraires », la régression que cela pourrait entraîner pour les femmes ( mais aussi les hommes), mais j’ai surtout retenu cet espoir d’une « Transformation Réversible » après les retours en arrière réactionnaires ( tels ceux auxquels on assiste en ce moment d’un bout à l’autre, ou presque, de la planète ), mais impulsée aussi par « l’appel à une action collective » de ses amis marxistes, appel que je partage volontiers.
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À Quatrième Explication, quatrième commentaire, je me réponds donc 🙂 :
En vérité, si l’on veut être vraiment lucide « l’appel à une action collective » est plus aisé à lancer qu’à poursuivre et l’on comprend que le fatalisme, – comme V.N.-, nous gagne aussi parfois, avec le temps qui passe …
Mais si on écoute … https://youtu.be/FOPqY9W_A3M?si=Vb2RMiA4J4qW6jO
On reprend à nouveau, – « encore un moment Monsieur le bourreau ! » 😉 – , espoir.
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Très bon entretien mais que faut-il en retenir : que les femmes ont intérêt à défendre le capitalisme. Voir même peut-être le conservatisme en tant que les acquis des femmes auraient a être conservés ? N’en déplaise à Véra Nikolski l’influence minoritaire est toujours intégrée sur une longue période. Dommage que Begaudeau n’est pas vu ça : on dit néofeminisme pour le séparer d’un féminisme dont on pourrait dire quoi ? Qu’il est conservateur ? Seuls les plus conservateurs parle de néofeminisme. Je tiens à dire que j’aime beaucoup le brillant esprit de Begaudeau mais que cette fois je dirais qu’il y a eu comme un raté.
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Et oui, j’ai aussi perçu chez elle un soupçon de conservatisme et en effet, elle prend soin de mettre en évidence ce qui la sépare des « néoféministes » et emploie des mots que Bégaudeau a relevés qui montrent qu’elle ne se sent pas particulièrement proche d’elles. Son approche ressemble d’ailleurs à celle de l’anglaise Mary Harrington, considérée par certains comme carrément réac. Je partage donc vos observations sur cette personne, à la différence que moi, elle me réjouit totalement, pour la raison simple qu’il me semble que c’est ce qui fait la différence entre pensée et idéologie (elle ne se soucie pas du tout de stratégies et ça fait du bien, punaise !). Elle m’a convaincue : je crois que ce qu’elle dit est vrai, j’adhère à son matérialisme froid, bien plus qu’à l’idéologie du féminisme dont elle se détache. Le fait d’essayer d’observer la réalité, même si elle ne nous plaît pas, m’intéresse beaucoup plus que la construction d’idées qu’il faudrait poursuivre. Toutefois, je pense que si l’on comprend que ce sont les conditions matérielles d’existence qui ont l’impact le plus puissant sur nos droits, plutôt que le ciel des idées, cela veut dire que l’on peut agir collectivement sur nos destins en agissant, précisément, sur ces conditions matérielles d’existence. Je trouve aussi que cela soulève une question qui me semble cruciale : l’égalité des sexes a progressé en partie parce que dans un monde de tertiaire ou tout le monde est un gratte-papier, nos modes de vie sont beaucoup moins genrés, ce serait injustifié qu’ils le soient, et ceci dans tous les aspects de nos vie, grâce au confort et aux progrès de la médecine. Or si l’on se dirige vers des modes de vie plus frugaux et que les rôles de genres se redessinent progressivement, réussira-t-on a préserver nos intérêts féministes et à ne pas régresser collectivement, malgré les différences inéluctables dans les rôles qui seront redéfinis dans un contexte plus difficile ? Je pense que c’est possible, pour ma part. Difficile mais possible. Fun fact : je partage son obsession pour l’antibiorésistance. D’ailleurs jusque dans les années 90, on pratiquait encore en médecine la phagothérapie, surtout dans les pays de l’Est, thérapies qui ont été totalement remplacées par les antibiotiques à l’Ouest, pour diverses raisons capitalisto-idéologiques, mais aucunement pour l’intérêt du patient, car c’est une piste sérieuse à creuser pour lutter contre le problème de l’antibiorésistance. Voilà une solution possible, qui ne nous nuirait pas, ni à l’environnement, tout comme la permaculture, rouvrir les voies de chemin de fer fermées par dizaines dans les campagnes, etc etc, il existe des moyens matériels qui ne nuisent pas à l’environnement NI à nos droits et qui nous permettrait de vivre non pas facilement de confortablement, mais pas non plus dans des conditions si terribles, je pense.
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C’est comme ça qu’on l’aime notre François. Capable de respecter son interlocuteur sans bomber le torse quand ce dernier salut la justesse de ses reformulations. Il faut dire que c’est assez aisé à propos d’une analyse dont on partage plus que l’essentiel. C’était une bonne idée d’inviter Véra Nikolski, tout le monde ne l’a pas encore lu, et c’est bien dommage. On ne remet jamais assez souvent le matérialisme historique à sa place, celle des fondations, la nature sous la culture, le corps sous l’esprit, etc. Et puis lancer ici et là quelques piques à l’endroit des moralines bobos, qu’elles soient roses ou vertes, est toujours savoureux. Le campisme ça soulage, s’en passer ne relève-t-il pas d’un certain . . « quadraturisme circulaire » ? Qui sera le prochain invité beaucoup plus rugueux cette fois ? . . Hmm oui . . C’est comme ça qu’on l’aime notre François.
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On pouvait se passer de la dernière partie