« Du TCE au Covid, l’agonie sans fin de l’UE » – Quartier ConstituantAvec Coralie Delaume

Émission du 28/05/2020

Afin de tirer le bilan de l’Union européenne à l’épreuve du Covid, nos amis les Constituants, parmi lesquels Manon Le Bretton et François Cocq, ont reçu l’essayiste Coralie Delaume.

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3 Commentaire(s)

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    « Ne laissons pas la question de l’Etat-Nation à l’extrême droite ». Voilà un « dit » qui vaut son pesant d’or. J’approuve. Cette question de l’ « Etat-Nation » a été peu à peu instituée en « salissure » par tous les partis Européistes, cad les partis du Capital et de l’ultra-Libéralisme. Ces « salissures » sociétales sont d’ailleurs le cheval de Troie de l’ultralibéralisme pour disqualifier leurs opposants, traités de « populistes » (c’est-à-dire réactionnaires nationalistes, fermés à la modernité de la mondialisation).

    Malheureusement, avec cette mondialisation, l’idéologie de la fraternité entre les peuples est subrepticement détournée et re-signifiée en concurrence libre et totale entre les individus et entre les entreprises : « Prolétaires, Entreprises de tous les pays, concurrencez-vous ! ». La nation doit disparaitre car, d’une nation à l’autre, les règles et l’histoire de la concurrence sont différentes, et du coup, « ça n’va pas bien ». L’Union européenne est bien mieux, car récente et donc sans Histoire pouvant témoigner d’autres alternatives que le simple « concurrencez-vous ! ».

    L’Europe donc – cad concrètement le dispositif « législatif-exécutif-judiciaire » qui organise l’Union Européenne, est, comme n’importe quel Etat-Nation, une force productive au sens marxiste. Les forces productives ne se trouvent pas uniquement dans les ateliers industriels (machines) pour produire des marchandises ; les forces productives ne sont pas non plus elles-mêmes forcément des marchandises ou des services qui s’achètent ; non, tout ce qui peut concourir à renforcer des « pouvoirs d’agir » est potentiellement force productive (par exemple la nature). La valeur d’échange d’un Etat ou d’une Union n’est pas connue car il/elle n’est jamais mise sur le marché ; ce qui est connu, par contre, c’est sa valeur d’usage : ça sert à quelque chose un Etat ou une Union !!! L’appropriation des forces productives est donc un enjeu considérable ; outre l’achat, cette appropriation peut tout aussi bien se faire :

    – par la force (au moyen-âge, la terre, l’épée, le serf, la charrue, étaient les principales forces productive de la noblesse, et le noble qui avait le plus d’épées, de terres, de serfs, de charrues, avaient aussi le plus d’argent, et finissait par s’approprier le pouvoir politique aux dépens des autres seigneurs) ;

    – ou par le vote comme c’est le cas dans les sociétés d’aujourd’hui, pour l’Etat.

    L’Etat ou l’Union sont des forces productives à la fois Economiques ET Idéologiques; à ce titre ceux qui le/la possèdent, peuvent « produire » économiquement et idéologiquement de manière « discrétionnaire », cad plutôt en faveur de certains citoyens que de certains autres :

    – Produire « économiquement ». Par exemple produire des biens avec des entreprises publiques. Produire encore du profit par le régime des taxes qu’il « impose » au peuple ; ou par les routes qu’il met gratuitement à disposition des entrepreneurs, routes financées par l’impôt, systématiquement plus pesant sur les plus pauvres cad les non-possédants : ce n’est pourtant pas la voiture de l’ouvrier qui détruit les routes, mais bien le camion de l’entrepreneur. En fait, la plus-value sur le travail est d’abord extorquée par un employeur, avant salaire (avant la fin du mois), et ensuite extorquée une seconde fois, après salaire, dans la fiscalité sur la consommation, et dans la fiscalité directe. Produire aussi de l’exécutif avec le pouvoir judiciaire, la police, l’armée.

    – Produire « idéologiquement ». Par exemple dans les espaces de paroles dont il dispose prioritairement et exclusivement. Par le crédit moral et le contenu de la parole de l’Etat (les ministères, les préfectures, les institutions, les médias publics), qui s’ajoutent aux médias privés détenus par les classes sociales les plus riches ; produire encore du consentement par la menace que constituent les règles (pouvoir législatif) qui régissent les échanges.

    Le pouvoir d’un Etat ou d’une Union est donc gigantesque. La conquête de l’Etat n’est donc pas un projet secondaire, annexe, dans la lutte des classes. Il est même essentiel. Celui qui tient l’Etat tient un pouvoir immense, car c’est lui qui dirige l’usage de « ces » forces. La « propriété des forces productives » est aussi essentielle que « les forces productives elles-mêmes ». Si l’aristocratie du moyen-âge n’avait pas laissé la propriété des moyens de production comme l’enclume, le marteau, l’atelier etc … pour fabriquer des épées, des charrues, des faux, des maisons, des moulins etc … aux artisans forgerons, maçons, menuisiers etc …, ces artisans ne seraient pas devenus, avec le long temps, des proto-capitalistes plus riches que les aristocrates et n’auraient pu prendre le pouvoir en 1789 à leurs dépens.

    Il se trouve que l’histoire européenne – et française en particulier, surtout depuis la dernière guerre avec le CNR – a produit des Etats et des régimes politiques qui faisaient une part « trop » favorable aux classes ouvrières, grâce aux Partis Communistes. Des pans entiers de l’activité étaient dans les mains de l’Etat plutôt que dans les mains des puissances économiques privées. L’idée de l’Union Européenne a constitué pour le Capital une opportunité magnifique pour casser cet état des choses cad pour transcender/transmuter les Etats nationaux en une Union Européenne toute différente.

    Car, que voit-on actuellement au niveau de l’Europe : la force productive de l’ « Union » Européenne est quasi intégralement tenue par le Capital privé ; il n’y a aucun service public, aucune entreprise publique au niveau de l’Union ! Toutes les lois, toutes, sont faites pour favoriser le commerce, la libre circulation des marchandises (dont la force de travail humaine), la libre concurrence du capital, et la libre concurrence du travail : le capitalisme a besoin de ce libéralisme, de cette concurrence au sein du capital, et de cette concurrence au sein du travail : elles sont toutes deux au bénéfice du Capital ; pas du tout au bénéfice du Travail ; et c’est exactement pour cela que le capital a initié et mis la main sur l’Union européenne ; pour faire des politiques exclusivement « économiques » (= politique de profit) et évincer quasiment toute politique « sociale » ; le code du travail français doit peu à peu s’aligner sur des directives européennes cad sur un code du travail patronal. Certes, la concurrence du Capital fait baisser le prix des marchandises et donc le profit (d’où la tentation « monopolistique ») mais elle est compensée par la baisse du prix de la force de travail (le salaire) grâce à la libre concurrence du travail et grâce au maintien d’un certain volant de chômage. Ceux qui décident du bon équilibre entre les deux concurrences, ce ne sont pas les travailleurs, ce sont les capitalistes. L’immigré, ce postulant au marché du travail est perçu comme un concurrent pouvant faire baisser le prix de la force de travail sur le marché du travail ; mais c’est en même temps pour les syndicats et les politiques un travailleur à conquérir pour lutter contre le capital.

    Mais, l’offensive capitaliste ne s’arrête pas là !!!! la conquête des Unions de nations ne suffit pas au capital. Il veut, au niveau mondial, s’arroger le droit d’ester en justice contre les Etats nationaux indociles, et ce à travers des traités internationaux, et des tribunaux qualifiés d’arbitraux. Voilà fondée une sorte de cartellisation légale. La justice devient un entre-soi capitaliste. Les cartels sont punis en France : pas pour longtemps !

    Mais ça ne suffit toujours pas : outre les Unions, les Traités et les Tribunaux Arbitraux, le capital veut faire gérer les Etats résiduels, ou les Unions, par des entreprises privées. C’est la prochaine étape, portée idéologiquement par le « libertarisme » américain, qui est un anarchisme individualiste.

    Bien évidemment, même si le Travail s’oppose au Capital, il n’existe aucun isomorphisme de structure entre le Capital et le Travail (qui s’interpénètrent totalement), mais il est urgent qu’une Internationale du Travail se dresse face aux Unions mondiales du capital.

    Cette internationale du travail peut tout à fait être inter-nationale, car la nation peut encore être une base d’attaque ou de repli, connue, sûre, contre les Unions actuelles tenues à 100% par le Capital et ses intérêts. Le Travail est « un peu perdu » dans les Unions, mais pas dans la nation. Défendre encore la nation c’est déjà, au moins emmerder le grand capital, celui du marché mondial qui étrangle et rend impuissants les travailleurs. N’abandonnons pas nos armes nationales, notre terrain historique, tant que nous ne sommes pas armés mondialement à un niveau crédible.

    L’idée d’appartenance au « monde » est à la mode, mais ne peut pas plaire de la même façon à ceux qui peuvent jouir du monde entier par leur voyages, leur multilinguisme, leurs multiples domiciliations, leur argent etc …, et ceux dont le destin économique les attache à un petit territoire, « nécessiteux » par nécessité, cad HLM, ou carton/voiture dans la rue, milieu où la connaissance de l’environnement est une condition de survie. Pour eux, changer de pays n’aboutirait qu’à changer de rue.

    Donc non, le mondialisme patronal ne peut pas ressembler à l’internationalisme salarial. On ne peut pas demander à un salarié de penser comme un patron, n’en déplaise aux lèche-bottes de la classe des parvenus qui admire par principe le patronat, dans une poltronnerie envieuse qui se traduit dans des rêves de promotion sociale ou dans des cauchemars de déchéance sociale.

    Non à la stratégie des « salissures » sociétales contre les pauvres, contre les salariés (communistes ou non), contre les gilets jaunes.

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