Jean Jaurès, Gluksmann et l’oligarchie financière

Le 27/03/2024 par Harold Bernat

Jean Jaurès, Gluksmann et l’oligarchie financière

Le dernier faux-nez de l’oligarchie financière à la sauce atlantiste, Raphaël Glucksmann, est sur orbite pour les prochaines européennes sous couleurs PS, et fatalement le système médiatique ne parle que de lui. Ses vains moulinets et ses meetings pathétiques tentent de vendre au peuple étranglé par l’inflation et malmené par des années de macronisme un « combat pour le démocratie ». Le comble de l’obscénité est évidemment atteint et dépassé quand ces fossoyeurs de la nation se présentent comme les derniers remparts des Lumières. À ces mensonges de plus en plus exténués, préférons le combat de Jaurès, contre la finance mondiale et pour la paix des peuples, seul à même de servir les intérêts des Français

Devant un immense portrait de Jean Jaurès, Raphaël Glucksmann, en campagne médiatique pour conserver ses 6.000 euros net par mois à Bruxelles, dernière patafix du énième rafistolage de la sociale-démocratie des traîtres aux luttes sociales, à Toulouse, devant une salle de grisonnants largués, s’extasie: « Partout, nous serons des démocrates de combat. » Les chantres de la dépossession nationale ne reculent devant rien, devant aucun mensonge, aucune corruption du sens des mots. Il va s’en dire – mais les rappels ne sont jamais complètement inutiles – que ce belliciste atlantiste, aussi creux qu’un bambou en plastique de chez « Maisons du monde », n’a jamais lu Jean Jaurès, qu’il n’a jamais combattu non plus même si la guerre est son viatique. Les pipeauteurs bien nés, les combattants de la dernière demi-heure, l’étiquette « Sciences po » en partage, ont tous en commun l’absence totale de travail sérieux et de probité intellectuelle. Ils se retrouvent aussi autour de la corruption et d’un déni sidérant de démocratie eux qui n’ont que ce mot à la bouche. Une marque de fabrique des globalistes qui gesticulent derrière des pupitres en beuglant « démocratie » avec des charismes de moules échouées sur la fin de leur histoire. Les voilà qui s’affairent dans la carrière du vide. Que ces gens aient fini par bousiller le politique ne fait plus vraiment de doute pour ceux qui ont encore une forme d’exigence sur le sujet.

Alors parlons de Jean Jaurès puisqu’il est bien malgré lui convoqué par ces spectres de l’adaptation au pire, ces vendeurs de globalisation et ces profiteurs de dépossession politique. Parlons argent, le nerf de la guerre qu’ils mènent depuis des décennies contre les classes sociales les plus modestes en faisant la promotion d’une UE sans âme dans une globalisation somnambule, un marché commun toujours plus large, une succursale technocratique anti-démocratique qui ne vend pas du rêve mais qui essore les peuples. Demain la Bosnie, dans trois jours l’Ukraine. Toujours plus bas socialement, toujours plus loin géographiquement, toujours plus rentables pour la baronnie prussienne de Von der Leyen et consors.

Les citations de Jaurès qui suivent seront toutes extraites d’un article de « la Dépêche du Midi », un article daté du 27 juin 1892. Il est intitulé le « Crédit démocratique ». Pour Jean Jaurès, la question de la Banque (une majuscule dans ses articles pour désigner la banque de France) était « la plus grande question économique et sociale posée devant la démocratie française. » Pour cela, écrit-il, il est nécessaire d’ »arracher l’industrie et le commerce, surtout la moyenne et petite industrie, le moyen et le petit commerce aux banquiers. » Ce qui est en jeu pour Jaurès, à travers le taux d’escompte, n’est autre que le prix de l’argent. « Le tribut énorme prélevé sur les affaires » correspond aujourd’hui à des transferts massifs de capitaux mobiles vers des capitalisations qui ne soutiennent pas l’économie réelle mais qui engraissent des oligarques. Contrairement à l’idéologie du ruissellement servie par des scribouilleurs qui se prennent pour des ministres de l’économie, Jaurès ne perdait jamais de vue la réalité du travail et de la valeur. Nous attendrons longtemps les bénéfices réels du CICE. Ces transferts massifs sont, pour Jaurès, « un obstacle formidable au développement des transactions et du travail. » Les plus puissants actionnaires des banques, à la fin du XIXe siècle comme aujourd’hui, sont des banquiers qui n’ont aucun intérêt à ce que la Banque appartienne à la nation. Ainsi, ajoute Jaurès en 1892, « nous sommes dans cette situation intenable, que la Banque, dite Banque de France qui devrait affranchir le travail national de l’onéreuse tutelle des banquiers, appartient, non à la France, mais aux banquiers. »

Afin de se débarrasser de cette tutelle, nécessaire pour escompter les papiers émis, Jean Jaurès envisageait d’instituer, auprès de chaque succursale de la Banque de France, un conseil d’escompte élu au suffrage universel et composé de commerçants et d’industriels ressortissant à cette succursale. Un conseil régional en quelque sorte. Dans l’intérêt des commerçants, le conseil aurait intérêt à émettre des crédits tout en veillant à s’auto-limiter. Un système d’assurance permettrait de couvrir les pertes. Il serait reparti au prorata des affaires avec la banque de ces commerçants et industriels élus. Pour autant, cette prudence ne devait pas empêcher d’émettre des crédits afin de ne pas grever l’économie. Quel meilleur système qu’un dispositif électif d’auto-contrôle qui verrait s’effondrer le privilège des banquiers tout en abaissant le coût de l’argent ? Dispositif renforcé par la possibilité qu’aura la Banque de France de recevoir des dépôts, de développer son émission de billets et de prêter à taux bas. La véritable opposition politique, le combat le plus essentiel qui devrait animer les « démocrates de combat« , pour faire droit à la formule de la patafix-UE Glucksmann, dit aussi GluGlu, ne se situe pas, pour Jean Jaurès, entre les libéraux économiques et les collectivistes égalitaristes mais entre ceux qui « entretiennent le privilège bancaire » et ceux qui veulent rendre la Banque à la nation.

La question est simple et simplement posée : « Comment obtenir qu’une Banque, appartenant à des banquiers, à des financiers, entre en lutte sérieusement, sincèrement, contre les banquiers et les financiers ! » Pour que la démocratie puisse se servir de ce « merveilleux instrument d’émancipation et d’action qui s’appelle la Banque« , il faut qu’elle soit « souveraine maîtresse et qu’elle n’introduise pas dans la maison même, avec des clauses en apparence rigoureuses une oligarchie financière hostile. » Que dire quand l’oligarchie financière hostile, non seulement s’introduit dans la maison, mais l’administre en se payant le luxe, comble du raffinement, de citer Jaurès comme une référence à la spoliation des peuples ?

« Je crois que l’on sera réduit à ce dilemme : ou bien laisser la Banque aux actionnaires, aux conditions actuelles, et renouveler purement et simplement le privilège, comme le proposent, en somme, la commission et le gouvernement ; ou bien, faire décidément de la Banque une banque d’Etat. » Voilà ce qui a toujours été inacceptable pour l’oligarchie financière et que les vains moulinets de GluGlu l’atlantiste accompagnent la résistance d’une nation au pouvoir financier anti-démocratique. Ainsi, poursuit Jean Jaurès, « la nation aura une puissance financière énorme : et elle pourra racheter tous les privilèges qui pèsent à l’heure actuelle sur le travail. » Les mêmes, à la fin du XIXe siècle ou aujourd’hui, qui mettent en avant la supposée spoliation du système « socialiste » ne remettent jamais en question le pouvoir de l’oligarchie financière et la mainmise des banques privées.

Ce n’est évidemment pas le socialisme de Jaurès qui précipite aujourd’hui la France dans un chaos social. Une administration anti-nationale qui engraisse une oligarchie financière en dépossédant la France de sa souveraineté bancaire ne peut que faire payer l’addition au peuple. L’odieux chantage à la dette entretenue et insolvable ne sert d’ailleurs qu’à cela. Le tout servi par quantités de traîtres à la démocratie qui, la main sur le coeur, vous vendent dans des meeting pathétiques le combat pour la démocratie. Le comble de l’obscénité est évidemment atteint et dépassé quand ces fossoyeurs de la nation se présentent, LBD et grenades aux poings, comme les derniers remparts de la démocratie face aux « extrêmes », mieux comme les héritiers des Lumières contre les « foules haineuses », expression d’Emmanuel Macron pour qualifier le mouvement des gilets jaunes en France fin 2018. Assurément, comme le rappelait le sénateur Alain Houpert sur le plateau de QG, le 25 mars dernier, « sous Macron, Jaurès serait traité de fasciste et de Munichois » . Mais De Gaulle ne serait pas en reste, « pro Poutine », pourquoi pas?

Jean Jaurès était aux antipodes de cette bouillie libre-échangiste UE encastrée dans des traités économiques et des spoliations financières qui échappent radicalement à toute forme de plébiscite populaire. Comme le rappelle récemment la transparente Valérie Hayer, cheffe de file macroniste pour la campagne de désinformation UE, « il existe des process institutionnels UE » au cas où les deux chambres nationales voteraient contre le CETA. Non mais oui. La liberté, comme l’analyse justement Maurizio Lazzaroto dans « La fabrique de l’homme endetté » (Editions Amsterdam, 2011), certes, mais à condition d’assumer « le mode de vie (consommation, emploi, dépenses sociales impôts etc.) compatible avec le remboursement. » Quand il s’agit de questionner notre rapport politique à la création monétaire un silence plombée vaut pour seule réponse. Cette question, celle de Jaurès, doit définitivement sortir de l’orbite du questionnement politique.

La haute bourgeoisie industrielle et commerciale a toujours raillé « les grands socialistes de 1848« . Rien de nouveau avec les faux-nez de la sociale-démocratie exténuée à la sauce Glucksmann, au terme de tous les lessivages et de tous les retournements de veste. Mais son triomphe idéologique en un siècle et demi aura été de réussir à incorporer dans ses rangs des hommes et des femmes sur lesquels elle se paie et prospère grassement tout en leur faisant la leçon. Ce sera la spoliation ou les extrêmes contre la démocratie, au choix. Que ce rapport de force s’inverse et le spectre du populisme et du nationalisme, de l’extrémisme est aussitôt brandi. Ou du poutinisme, pour cette saison. Elle préfèrera, et nous y sommes, la guerre pour la globalisation financière à la paix des nations, le marché commun et le dumping social, ce qu’elle appelle dans sa fausse langue « L’Europe démocratique », à la République sociale qui peut seule nous sauver de l’injustice et de la violence située.

Contrairement à ce que voudraient nous faire croire les marchands de bouillie européiste, il ne s’agit pas d’attaquer la finance ou le crédit. Jean Jaurès soutient en 1892 que « le crédit est excellent pour la démocratie« , à condition que cette excellence soit aux mains de la souveraineté politique, instrument essentiel de la République sociale. Il s’agit donc de réunir les forces de la nation contre un pouvoir construit autour du démembrement de la souveraineté populaire, un pouvoir essentiellement médiatique construit pour promouvoir des droits anti-sociaux, dans les termes de Joseph Proudhon. Faire payer toujours plus cher la spoliation des communs. Ces forces d’opposition seront bien celles des démocrates de combat, d’où la nécessité pour l’oligarchie de la finance de promouvoir quantité de faux-nez qui nous voleront les signifiants de la résistance. « Démocrates de combat« , la formule est bonne à condition d’avoir lu Jaurès et de se battre réellement. Les faquins Narcisse, toujours plus creux, toujours plus faux, toujours plus irréels, auront pour eux l’évidence du siècle. Du degré de politisation des citoyens dépendra la force et l’issue de cette lutte contre la dépossession. La République, telle que Jaurès l’entendait, sociale, a aussi cette mission historique, elle devrait l’avoir encore : faire sortir les hommes de leur isolement politique. C’est pour cette raison aussi que son école, dans sa dimension critique et politique, est attaquée comme jamais. Ces forces démocratiques et nationales auront raison, conclut Jaurès dans ce texte prophétique, « des prétentions insolentes de l’oligarchie financière, servies, dans les chambres de commerce – devenues aujourd’hui des écoles – par l’optimisme ignorant et l’égoïsme béat de l’oligarchie bourgeoise. » Donnons lui enfin raison.

Harold Bernat

Photo d’ouverture Mathieu Delmestre

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1 Commentaire(s)

  1. Très bonne photo d’illustration : le travail sur la lumière met bien en évidence deux contents d’eux, contents d’eux rayonnant de bonheur. Ah ! quel sentiment délicieux que l’approbation sociale ! Le bonheur de « la bourgeoisie approuvée » est touchant à contempler !

    Harold met, aussi, bien en évidence un des partis-pris particulièrement piégeux de la puissante bourgeoisie financière tapie derrière tout ce cirque ; parti-pris qui consiste en l’exploitation de la puissance du parlé ordinaire. Tout est dans le discours (encore et toujours) : il s’agit de faire dire aux mots (et donc aux choses) ce qui n’est pas dans leur essence (cad ce qui n’est pas l’essentiel) ; la confusion savante entre prédicat, essence et attribut est à l’honneur :

    – par exemple « les foules haineuses » pour désigner le mouvement des gilets jaunes qui sont ainsi « essentialisés » en foules haineuses.

    – par exemple « la chasse à l’homme » pour qualifier la mise en accusation d’un violeur pédophile ami du président (c’est bizarre mais Gérard Miller, triste sire certes, n’a pas eu droit à ce genre d’égards présidentiels) (il est vrai que Macron ne se laisse pas hypnotiser si facilement).

    Tout ce charcutage, tout ce kidnapping de sens vise à fournir à la petite bourgeoisie débutante et/ou apeurée politiquement (y compris une certaine bourgeoisie ouvrière en promotion sociale), de larges champs de justifications à leur retrait des mouvements contestataires « SOCIAUX ».

    En plus de ce confusionnisme verbale, on résumera la panoplie du kidnapping idéologique qu’opère la grande bourgeoisie financière (ici, je ne veux pas confondre bourgeoisie financière et bourgeoisie industrielle, cette dernière étant désormais tributaire de la première, d’où, à mon avis, et en partie, la séparation de LR et de Renaissance) :

    1- polarisation, orientation du potentiel compassionnel (la gentillesse affichée) de chacun sur des champs d’actions SOCIETAUX plutôt que sociaux (par exemple « fillité = garçonnité», mais surtout pas « pauvrité = richité »)

    2- polarisation sur des modes d‘actions INDIVIDUELS pour « s’en sortir dans la vie » : heures supplémentaires, autoentrepreneur, développement personnel, amour généralisé, résilience, méditation, importance de l’AUTRE, libéralisation de la drogue….

    3- polarisation sur des modes d’actions collectifs DOUX (dialogue, respect mutuel, cérémonies compassionnelles de déploration collective lors de catastrophes, etc …) d’où sont bannies toute haine, toute violence et surtout, à gôche, toute « domination » (cad, en fait, haro sur la « dictature » du prolétariat, mais pas celle -invisible- de la finance et de l’ économie, ni celle de la violence dite légitime de la bourgeoisie).

    SOCIETALISME – INDIVIDUALISME – DOUCEURISME,
    voilà le triptyque populaire qui assure robustesse et stabilité à l’idéologisme grand bourgeois.

    Pour info
    – (https://dictionnaire.lerobert.com/definition/predicat) où Charles de Rémuzat (bas de page) précise qu’il y a des « prédicats d’essence ». L’essentiel étant de le préciser pour éviter tout confusionnisme.

    – (https://fr.wikipedia.org/wiki/Impostures_intellectuelles) pour écorner encore le post-modernisme.

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